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<p style="text-align: justify;">= sensation d'incapacité ("lassitude", "fatigue permanente", "difficultés intellectuelles", "perte de force",…) non/ peu améliorée par le repos. Différente donc de la fatigue, phénomène physiologique secondaire à une activité physique/ psychique inhabituelle calmée par le repos.</p><p style="text-align: justify;">Symptôme vague et aspécifique fréquent… → partir des symptômes/ signes associés s'ils existent. Une asthénie isolée doit susciter une démarche diag rigoureuse et difficile. Dans 85% des cas on retrouve, à parts égales, une origine organique/ psychogène/ réactionnelle à un événement extérieur. Une asthénie persistant > 6 mois sans étiologie organique/ psychique objectivée = "syndrome de fatigue chronique".&nbsp;</p>
Une '''asthénie''' est définie comme une sensation d'incapacité généralisée survenant en dehors d'un effort inhabituel et fréquemment peu améliorée par le repos. Elle est parfois désignée de manière impropre comme une "fatigue permanente" ou "fatigue intense".
 
Elle diffère donc de la <u>fatigue</u>, phénomène physiologique secondaire à une activité physique ou psychique inhabituelle et se résolvant au repos. Elle est également différente d'une <u>fatigabiltié anormale</u>, épuisement musculaire survenant trop rapidement ou pour des efforts mineurs et se résolvant au repos.
 
L'asthénie est une plainte imprécise et aspécifique fréquente… Il convient de commencer par exclure par l'anamnèse une simple fatigue physiologique. Le cas échéant, partir de l'anamnèse et des symptômes ou signes associés. Une asthénie isolée doit susciter une démarche diagnostique rigoureuse et difficile. Dans 85% des cas on retrouve, à parts égales, une origine organique ou psychogène ou réactionnelle à un événement extérieur. Dans 15% des cas, aucune étiologie n'est retrouvée.
 
Une asthénie persistant plus de 6 mois sans étiologie organique ou psychique objectivée par un bilan approprié constitue le "[[syndrome de fatigue chronique]]".
 
== Principales étiologies d'asthénie isolée ==
== Principales étiologies d'asthénie isolée ==
<p style="text-align: justify;">[[File:Asthénie.png]]</p><p style="text-align: justify;">Les plus fréquentes&nbsp;: pathos cardio-pulmonaires, anémie, infections chroniques, néo, dépression, cachexie / déconditionnement, pathos rhumatismales, iatrogènes.</p>
[[Fichier:Asthénie.png|alt=Asthénie - étiologies|centré|cadre|Asthénie - étiologies]]
Les étiologies sont innombrables. Les plus fréquentes sont les pathologies cardio-pulmonaires, les anémies, les infections chroniques, les néoplasies, la dépression, les troubles fonctionnels et le syndrome de fatigue chronique, la cachexie et le déconditionnement, les pathologies rhumatismales, les endocrinopathies les médicaments (les plus courants : psychotropes, cardiotropes et anti-histaminiques) et toxiques.
 
== Démarche diagnostique ==
== Démarche diagnostique ==


=== Anamnèse ===
=== Anamnèse ===


*<span style="text-align: justify;">Distinguer asthénie d'une fatigue physiologique/ surmenage</span>
<span style="text-align: left;">A noter que le patient peut décrire de manières diverses et parfois trompeuses une asthénie&nbsp;: "lassitude", "fatigue permanente", "difficultés intellectuelles", "perte de force" (une "faiblesse des membres inférieurs" est une description fréquente chez les patients âgés), "malaises",…</span>
*<span style="text-align: justify;"></span>Soulagement par le repos&nbsp;:
 
**Partiellement → plaide pour une asthénie organique/ une fatigue physiologique
*<span style="text-align: left;">Distinguer une asthénie d'une fatigue physiologique ou "surmenage", d'une dyspnée d'effort (pathologie cardio-pulmonaire ?) ou d'une fatigabilité musculaire anormale (syndrome myasthénique ?)</span>
**Non (voire aggravation&nbsp;: asthénie matinale) → plaide pour une asthénie psychique
*Soulagement par le repos&nbsp;:
**Partiel → plaide pour une asthénie organique ou une fatigue physiologique
**Non (voire aggravation&nbsp;: asthénie matinale) → plaide pour une asthénie psychique ou un syndrome d'apnées du sommeil
*Assuétudes&nbsp;?
*Assuétudes&nbsp;?
*Traitement (hypnotiques, antidépresseurs, inducteurs de dysthyroïdie, laxatifs, diurétiques,…)
*Traitement (psychotropes, cardiotropes, anti-histaminiques, inducteurs de dysthyroïdie, laxatifs, diurétiques,…)
*Régime hypocalorique&nbsp;? Grossesse&nbsp;? Milieu familial&nbsp;? Profession&nbsp;? Activité physique&nbsp;?
*Régime hypocalorique&nbsp;? Grossesse&nbsp;? Milieu familial&nbsp;? Profession&nbsp;? Activité physique&nbsp;?
*Caractéristiques&nbsp;:
*Caractéristiques&nbsp;:
**Physique/ mentale/ sexuelle/ globale&nbsp;?
**Etat physique, mental, sexuel, global&nbsp;?
**Horaire (matin → ++ psychique, soir → ++ organique)&nbsp;?
**Horaire (matin → ++ psychique, soir → ++ organique)&nbsp;?
**Vitesse d'installation/ évolution (rapide d'intensité croissante → ++ organique)
**Vitesse d'installation et évolution (rapide d'intensité croissante → ++ organique)
**Episodes antérieurs (++ psychogène)&nbsp;?
**Episodes antérieurs spontanément résolutifs&nbsp;(++ psychogène)&nbsp;?
**Signes orientant vers une cause organique (fièvre/ amaigrissement franc/…)
**Signes orientant vers une cause organique (fièvre, amaigrissement franc, purpura,…)
**Répercussions socio-professionnelles (négatives ou positives)&nbsp;?
**Répercussions socio-professionnelles (avantage social ou familial ? dégradation sociale ou familiale ?)
**Hypersomnie non réparatrice&nbsp;? Apnées du sommeil&nbsp;? Troubles d'endormissement (anxiété ++)&nbsp;? Réveils précoces (dépression ++)&nbsp;? Signes de dépression&nbsp;?
**Hypersomnie non réparatrice ? Apnées du sommeil ? Troubles d'endormissement (anxiété ?) ? Réveils précoces (dépression ?) ? Signes de dépression ?


=== Examen clinique ===
=== Examen clinique ===


*, état général, suivi du poids, hypoTA orthostatique, thyroïde, ganglions, TR etTV, abdomen (masse, HSM, splénomégalie), cutané (ictère, mélanodermie), cavité buccale (candidose, leucoplasie chevelue),…
*Température, état général, suivi du poids, test d'hypotension orthostatique, thyroïde, ganglions, touchers pelviens, abdomen (masse, hépato et/ou splénomégalie), cutané (ictère, mélanodermie), cavité buccale (candidose, leucoplasie chevelue),…
*Examen neuro avec une attention particulière sur les déficits sensitivo-moteurs, ROT (polyneuropathie aiguë&nbsp;?),
*Examen cardio-vasculaire (présence d'oedème, jugulaires, souffle, dyspnée de repos ou d'effort,...)
*Examen neurologique avec une attention particulière sur les déficits sensitivo-moteurs et les réflexes myotatiques (polyneuropathie aiguë&nbsp;?)
 
Il oriente le bilan complémentaire en cas de mise en évidence d'anomalies spécifiques (cf les chapitres correspondants).
 
=== Examens complémentaires systématiques en cas d'examen clinique normal ou aspécifique ===
 
En cas d'asthénie récente avec une explication évidente (post-infection, stress aigu,…) et en l'absence de signe associé ou d'état général dégradé → mise au repos et réévaluation après 1 à 2 semaines avant de commencer un bilan.
 
En cas d'absence de signes orientant le bilan et d'asthénie persistante, il est licite de réaliser systématiquement&nbsp;:


=== Examens complémentaires systématiques en cas d'examen clinique normal ===
*Biologie&nbsp;: hémato-numération-formule, CRP, VS, ionogramme, fonctions rénale et hépatique, Hb1Ac, électrophorèse des protéines, LDH, CK, fer, ferritine, Saturation de la transferrine, cortisol, TSH, β-hCG, testostérone, LH, FSH, marqueurs maladie cœliaque,… +- (sérologies courantes, FAN, ANCA, FR, anti-CCP),…
<p style="text-align: justify;">En cas de fatigue récente avec une explication évidente (post-infection, stress aigu,…) et en l'absence de signe associé/ de DEG → mise au repos et réévaluation 1-2 semaines après avant de commencer un bilan</p><p style="text-align: justify;">En cas d'absence de signes orientant la MAP/ asthénie persistante, il est licite de faire systématiquement&nbsp;:</p>
*Biologie&nbsp;: hémato-numération-formule, CRP, VS, iono, créat, transaminases, glycémie à jeun, électrophorèse des protéines, LDH, CK, PAL, GGT, fer, ferritine, Sat Tf, cortisol, TSH, β-hCG, testostérone, LH, FSH, marqueurs maladie cœliaque,… +- sérologies, FAN, ANCA, FR, anti-CCP,…
*Tigette urinaire
*Tigette urinaire
<p style="text-align: justify;">En cas de persistance de l'asthénie et bilan négatif, on discutera l'utilité de&nbsp;:</p>
*Sérologies, auto-Ac
*RX thorax
*Echo abdo
*Consultation psy
<p style="text-align: justify;">Si au terme de cette évaluation aucune étiologie n'est clairement identifiée&nbsp;:</p>
*Si DEG nette faisant craindre une patho grave évolutive → bilan hospitalier
*Sinon → mettre le patient au repos et le suivre qq semaines
**Si l'on n'observe ni amélioration ni apparition d'un signe orientant le diag → bilan hospitalier


== Le "syndrome de fatigue chronique" ==
En cas de persistance de l'asthénie et bilan négatif, on discutera l'utilité de&nbsp;:
<p style="text-align: justify;">Etiologie obscure (EBV&nbsp;? EntéroV&nbsp;? Dysimmunité&nbsp;? Troubles psychiatriques&nbsp;?...) son existence même est discutée. Frontières floues avec divers syndromes fonctionnels (fibromyalgie, troubles fonctionnels intestinaux, anxiété, attaques de panique, troubles somatoformes). Demeure un diag d'exclusion (organique/ psychiatrique) et doit être remis en question en cas de modification évocatrice de la sémiologie.</p><p style="text-align: justify;">2F > 1H, ++ < 40 ans actifs, ++ dans un contexte de stress, ++ début brutal par un syndrome d'allure grippal faisant place à une fatigue permanente/ fatigabilité/ intolérance à l'effort durant <u>></u> 6 mois. Possibles symptômes associés&nbsp;: arthromyalgies, pseudo-vertiges, troubles mnésiques/ de la concentration, céphalées, troubles du sommeil,…</p><p style="text-align: justify;">Patients svt très revendicatifs et agressifs envers le corps médical, svt persuadés d'être atteint d'une patho grave (élément péjoratif), dégradation socio-professionnelle.</p><p style="text-align: justify;">Aucun traitement n'a jamais été démontré efficace → réassurance (ne pas nier la réalité des plaintes mais expliquer que l'on a exclu les pathos graves), thérapies cognitivocomportementales de réadaptation à l'effort, techniques de relaxation,… laisser la porte ouverte aux paramédecines…</p>
 
*Sérologies et auto-anticorps si non encore réalisés
*Radiographie thoracique
*Echographie abdominale
*Consultation en psychiatrie
 
Si au terme de cette évaluation aucune étiologie n'est clairement identifiée&nbsp;:
 
*En cas de nette dégradation de l'état général faisant craindre une pathologie grave évolutive → bilan intra-hospitalier.
*Sinon → mettre le patient au repos et le suivre quelques semaines.
**Si l'on n'observe ni amélioration ni apparition d'un signe orientant le diagnostic ou en cas de doute quant à la réalité des plaintes → bilan et observation intra-hospitalière.
 
En cas de bilan négatif, retenir des troubles psychogènes ou un [[Syndrome_de_fatigue_chronique|syndrome de fatigue chronique]]. Remettre en cause ce diagnostic en cas de modification clinique.
 
== Auteur(s) ==
 
Dr [[Utilisateur:Shanan Khairi|Shanan Khairi]], MD
 
== Bibliographie ==
EMC, Traité de médecine AKOS, Elsevier, 2018
 
Shefner JM, Approach to the patient with muscle weakness, Uptodate, 2022
[[Category:Sémiologie clinique]]

Version actuelle datée du 16 mai 2024 à 16:08

Une asthénie est définie comme une sensation d'incapacité généralisée survenant en dehors d'un effort inhabituel et fréquemment peu améliorée par le repos. Elle est parfois désignée de manière impropre comme une "fatigue permanente" ou "fatigue intense".

Elle diffère donc de la fatigue, phénomène physiologique secondaire à une activité physique ou psychique inhabituelle et se résolvant au repos. Elle est également différente d'une fatigabiltié anormale, épuisement musculaire survenant trop rapidement ou pour des efforts mineurs et se résolvant au repos.

L'asthénie est une plainte imprécise et aspécifique fréquente… Il convient de commencer par exclure par l'anamnèse une simple fatigue physiologique. Le cas échéant, partir de l'anamnèse et des symptômes ou signes associés. Une asthénie isolée doit susciter une démarche diagnostique rigoureuse et difficile. Dans 85% des cas on retrouve, à parts égales, une origine organique ou psychogène ou réactionnelle à un événement extérieur. Dans 15% des cas, aucune étiologie n'est retrouvée.

Une asthénie persistant plus de 6 mois sans étiologie organique ou psychique objectivée par un bilan approprié constitue le "syndrome de fatigue chronique".

Principales étiologies d'asthénie isolée

Asthénie - étiologies
Asthénie - étiologies

Les étiologies sont innombrables. Les plus fréquentes sont les pathologies cardio-pulmonaires, les anémies, les infections chroniques, les néoplasies, la dépression, les troubles fonctionnels et le syndrome de fatigue chronique, la cachexie et le déconditionnement, les pathologies rhumatismales, les endocrinopathies les médicaments (les plus courants : psychotropes, cardiotropes et anti-histaminiques) et toxiques.

Démarche diagnostique

Anamnèse

A noter que le patient peut décrire de manières diverses et parfois trompeuses une asthénie : "lassitude", "fatigue permanente", "difficultés intellectuelles", "perte de force" (une "faiblesse des membres inférieurs" est une description fréquente chez les patients âgés), "malaises",…

  • Distinguer une asthénie d'une fatigue physiologique ou "surmenage", d'une dyspnée d'effort (pathologie cardio-pulmonaire ?) ou d'une fatigabilité musculaire anormale (syndrome myasthénique ?)
  • Soulagement par le repos :
    • Partiel → plaide pour une asthénie organique ou une fatigue physiologique
    • Non (voire aggravation : asthénie matinale) → plaide pour une asthénie psychique ou un syndrome d'apnées du sommeil
  • Assuétudes ?
  • Traitement (psychotropes, cardiotropes, anti-histaminiques, inducteurs de dysthyroïdie, laxatifs, diurétiques,…)
  • Régime hypocalorique ? Grossesse ? Milieu familial ? Profession ? Activité physique ?
  • Caractéristiques :
    • Etat physique, mental, sexuel, global ?
    • Horaire (matin → ++ psychique, soir → ++ organique) ?
    • Vitesse d'installation et évolution (rapide d'intensité croissante → ++ organique)
    • Episodes antérieurs spontanément résolutifs (++ psychogène) ?
    • Signes orientant vers une cause organique (fièvre, amaigrissement franc, purpura,…)
    • Répercussions socio-professionnelles (avantage social ou familial ? dégradation sociale ou familiale ?)
    • Hypersomnie non réparatrice ? Apnées du sommeil ? Troubles d'endormissement (anxiété ?) ? Réveils précoces (dépression ?) ? Signes de dépression ?

Examen clinique

  • Température, état général, suivi du poids, test d'hypotension orthostatique, thyroïde, ganglions, touchers pelviens, abdomen (masse, hépato et/ou splénomégalie), cutané (ictère, mélanodermie), cavité buccale (candidose, leucoplasie chevelue),…
  • Examen cardio-vasculaire (présence d'oedème, jugulaires, souffle, dyspnée de repos ou d'effort,...)
  • Examen neurologique avec une attention particulière sur les déficits sensitivo-moteurs et les réflexes myotatiques (polyneuropathie aiguë ?)

Il oriente le bilan complémentaire en cas de mise en évidence d'anomalies spécifiques (cf les chapitres correspondants).

Examens complémentaires systématiques en cas d'examen clinique normal ou aspécifique

En cas d'asthénie récente avec une explication évidente (post-infection, stress aigu,…) et en l'absence de signe associé ou d'état général dégradé → mise au repos et réévaluation après 1 à 2 semaines avant de commencer un bilan.

En cas d'absence de signes orientant le bilan et d'asthénie persistante, il est licite de réaliser systématiquement :

  • Biologie : hémato-numération-formule, CRP, VS, ionogramme, fonctions rénale et hépatique, Hb1Ac, électrophorèse des protéines, LDH, CK, fer, ferritine, Saturation de la transferrine, cortisol, TSH, β-hCG, testostérone, LH, FSH, marqueurs maladie cœliaque,… +- (sérologies courantes, FAN, ANCA, FR, anti-CCP),…
  • Tigette urinaire

En cas de persistance de l'asthénie et bilan négatif, on discutera l'utilité de :

  • Sérologies et auto-anticorps si non encore réalisés
  • Radiographie thoracique
  • Echographie abdominale
  • Consultation en psychiatrie

Si au terme de cette évaluation aucune étiologie n'est clairement identifiée :

  • En cas de nette dégradation de l'état général faisant craindre une pathologie grave évolutive → bilan intra-hospitalier.
  • Sinon → mettre le patient au repos et le suivre quelques semaines.
    • Si l'on n'observe ni amélioration ni apparition d'un signe orientant le diagnostic ou en cas de doute quant à la réalité des plaintes → bilan et observation intra-hospitalière.

En cas de bilan négatif, retenir des troubles psychogènes ou un syndrome de fatigue chronique. Remettre en cause ce diagnostic en cas de modification clinique.

Auteur(s)

Dr Shanan Khairi, MD

Bibliographie

EMC, Traité de médecine AKOS, Elsevier, 2018

Shefner JM, Approach to the patient with muscle weakness, Uptodate, 2022