Rectocolite ulcéro-hémorragique (RCUH)

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Maladie inflammatoire chronique idiopathique du TD avec des lésions continues limitées à la muqueuse, présence d’abcès cryptiques. Les lésions débutent généralement au rectum pour s’étendre vers le colon (très rarement l’iléon), le reste du TD restant indemne. Les manifestations anopérinéales sont rares. Les manifestations extradigestives sont bien moins fréquentes que dans le Crohn. Le tabac a un rôle protecteur. L’étiopathogénie est obscure mais impliquerait des facteurs infectieux (rougeole, mycobacterium paratuberculosis, listeria monocytogenes), génétiques (association avec le génotype HLA-DRB1) et environnementaux induisant une réaction inflammatoire excessive.

 

Rare (~2-10/100.000 hab/an), +++ israélites, blancs > méditerranéens, Europe et Amérique du Nord, ++ 25-35 ans (mais deuxième pic entre 50-60 ans), il existe des formes familiales.

 

CLINIQUE

 

Evolution par poussées-rémissions. Début insidieux ou brutal. Symptôme dominant = diarrhée, habituellement hémorragique, révélateur dans 50% des cas. Autres signes : ténesme, d+ rectales, rectorragies, d+ hypogastriques/ cadre colique (surviennent généralement plus tardivement et sont svt post-prandiales), alternance de diarrhée-constipation, N+, V+, anorexie, amaigrissement, t° modérée possible. La palpation abdominale est discrètement douloureuse, le colon G pouvant être un peu spastique. Les atteintes de la muqueuse oculaire/ buccale, de la peau, des phanères ou de la marge anale sont exceptionnelles. Le toucher rectal peut révéler un sphincter contracturé, un aspect granité de la muqueuse, la palpation de pseudopolypes et le doigtier ramène habituellement du sang.

 

On note parfois des circonstances déclenchantes : infection, ABth, choc psychologique.

 

Les manifestations extra-digestives sont sensiblement les mêmes que dans le Crohn, mais bien moins fréquentes.

 

COMPLICATIONS

 

  • Perforation colique (2-8%) : lourde mortalité. FR : colectasie, pancolite, poussée sévère, première poussée. Le pneumopéritoine radiologique est un signe tardif → en cas de non amélioration des symptômes et de persistance de signes généraux au bout de qq j de tt médical optimal d’une colectasie, l’indication opératoire doit être posée même en cas de RX négative.
  • Colectasie et mégacolon toxique (2-13%) : complication grave (mortalité de 2% mais de 44% en cas de perforation) secondaire à l’extension à la musculeuse, dilatation colique dont la dimension critique est de 5 cm au colon G, de 7 cm au colon transverse et D. ! les anticholinergiques, opiacés, neuroleptiques et antidiarrhéiques peuvent jouer le rôle de facteurs favorisants/ aggravants → TOUJOURS éviter ces médicaments lors des poussées. Les signes cliniques évocateurs sont : t° > 38,6°C, RC > 120, GB > 10500 avec PNN prédominants, anémie, déshydratation, confusion, trouble ionique, hypoTA, météorisme. L’AAB pose le diag (mesure du diamètre colique) et la présence d’un double contour gazeux muqueux traduit un risque de perforation.

·       Traitement : aspiration nasogastrique, jeûne, correction des troubles ioniques, ABth à large spectre, +- 40mg/j de prednisone (mais risque de masquer la clinique d’une perforation) → si pas d’amélioration en max 48h : chirurgie.

  • Sténoses (5-10%) : svt après 5 ans d’évolution d’une maladie étendue. Potentiellement néoplasiques avec histo parfois négative → envisager résection préventive.
  • Dysplasies : surveillance ou résection préventive selon le grade histologique.
  • Cancer colorectal (19%, ++ vers 45 ans) : risque majeur en cas de pancolite diagnostiquée avant 15 ans, toujours à suspecter devant la survenue d’une sténose.
  • Hémorragies massives : rares, dans les formes graves, nécessitent rarement une chir.

 

DIAGNOSTIC

 

Le diagnostic repose avant tout sur l’anamnèse et la clinique.

 

BIOLOGIE

 

Anémie par carence martiale (plus rarement inflammatoire ou hémolytique auto-immune), hyperleucocytose fréquente, alcalose métabolique (perte fécale de NaCl), possible hypoNa/K/Ca/Mg, hypoalbuminémie, possibles carences vitaminiques.

 

Reflètent l’activité : taux d’Hb, GB, VS.

 

COLOSCOPIE ET BIOPSIES

 

On observera des lésions évolutives (ulcérations ++, muqueuse oedémateuse et érythémateuse, sténoses) et cicatricielles (ulcères cicatrisés, pseudopolypes, sténoses). Rôle : diagnostic, dépistage de dys/néoplasies, bilan préop.

 

Anapath : le rectum est quasi toujours atteint → l’absence de lésion rectale doit remettre en cause le diag. Les lésions sont continues, pas d’intervalle de muqueuse saine. Extension rétrograde du rectum vers le caecum. Lésions muqueuses et sous-muqueuses, les plans musculaires et sous-séreux ne sont pas/peu intéressés. Nombreux abcès cryptiques, absence de fistule ou de fissure.

 

Lors de la découverte d’une colite atypique, on procédera à une OGDuodénoscopie (maladie de Crohn ?)

 

IMAGERIE

 

  • AAB : on retrouve parfois un aspect épaissi de la paroi colique avec des images aériques dessinant un colon tubulé avec perte des haustrations. Surtout utile en cas de suspicion de colectasie ou de perforation.
  • Lavement baryté (après régime sans déchêt et vidange colique) : mise en évidence de signes précoces et de l’extension des lésions. Au cours des formes graves, on utilisera un PC hydrosoluble.
  • Scintigraphie au Tc : utile en cas de forme sévère CI la RX et la colono.
  • CT ou IRM ont une bonne Se/Sp

 

BILAN D’EXTENSION ET DE SEVERITE

 

Distinguer : rectite, recto-sigmoïdite, colite G, colite étendue (jusqu’à l’angle hépatique), pancolite.

 

Critères de sévérité :

 

 

Selles /j

RC

Ht

Perte pondérale

VS

Albumine

Légère

< 4

< 90

N

N

Aucune

N

N

Modérée

4-6

90-100

30-40%

< 38,5

< 10%

20-30

30-35

Sévère

> 6

> 100

< 30%

> 38,5

> 10%

> 30

< 35

 

PRINCIPAUX DD

 

Maladie de Crohn, colites infectieuses, colite ischémique, colite pseudo-membraneuse, colites  hémorragiques post-ambiotiques, colite collagène, colon irritable, hémorroïdes et fissures anales, cancer recto-colique,…

 

TRAITEMENTS

 

  • Chez la femme enceinte : avis gynéco, mais de toute façon :

·       Ne pas dépasser 2g/j pour le 5-ASA

·       Allaitement est CI si azathioprine ou 6-mercaptopurine

·       Eviter l’infliximab durant au moins le dernier trimestre.

  • Pas de traitement en cas de RCUH asymptomatique

 

  1. MESURES GENERALES

 

Diète lors des crises : régime sans fibres +- compléments (vitamines,…)

 

  1. TRAITEMENT EN CHRONIQUE = DE FOND

 

  • Le traitement est en principe définitif, mais peut être discuté en cas de 1ère poussée de rectite.
  • En cas de proctite/ sigmoïdite : 5-ASA minimum 3g/j, topique/ orale/ combinée, biol et urines 1x/an
  • Colite étendue : 5-ASA minimum 3g/j per os, biol et urines 1x/an
  • Pancolite : immunosuppresseurs classiques : azathioprine (2-2,5 mg/kg/j)/ 6-mercaptopurine (1,5 mg/kg/j). Surveillance tous les trimestres de la formule sanguine et des enzymes hépatiques.

 

  1. TRAITEMENT EN PHASE AIGUE

 

Traitement symptomatique.

 

5-ASA (mézalasine) 4g/j ( ! surveiller la créatinine) et/ou corticoïdes per os 1 mg/kg/j d’équivalent prednisone 3-7 semaines (si échec : corticoth IV prednisone 1mg/kg/j et/ ou (ABth ciprofloxacine 2x500mg/j + métronidazole 3x500mg/j, contesté, en cas de patho infectieuse) et/ ou (nutrition parentérale, utilisée avant l’introduction de l’infliximab pour les patients refusant les corticoïdes). On peut également utiliser des corticoïdes locaux (budénoside, 9mg/j durant 6 semaines). L’Infliximab peut-être utilisé en cas de R aux corticoïdes ou d’emblées pour les poussées sévères. Les poussées sévères nécessitent une hospit.

 

! la limitation de l’’utilisation des corticoïdes est l’enjeu majeur de la stratégie thérapeutique ! Commencer à doses maximales, arrêter par paliers de 10-20 mg toutes les semaines. Adjoindre vit D + Ca +- bisphosphonate (en cas d’ostéoporose avérée)

 

La corticodépendance est définie comme l’impossibilité de réduire la dose à moins de 10mg/j 3 mois après le début de la cure ou la survenue d’une récidive moins de 3 mois après la fin de la cure. La corticorésistance est définie comme la persistance d’une maladie active malgré une dose d’au moins 0,75mg/kg/j durant 4 sem.

 

Schéma décisionnel :

  • Poussée légère/ modérée :

·       Proctite/ sigmoïdite, colite G :

§ Mésalazine per os/ topique + budénoside topique

  1. Deuxièmes choix : prednisone per os +- azathioprine/ 6-mercaptopurine

·       Pancolite :

§ Mésalazine per os + prednisone

  1. Deuxièmes choix : prednisone +- azathioprine/ 6-mercaptopurine, infliximab
  2. Poussée sévère ou échec des tts précédents :

·       Prednisone IV (+- Infliximab ?)

§ Deuxièmes choix : ciclosporine IV, colectomie en cas d’échec

 

  1. RECOURS A LA CHIRURGIE

 

  • En urgence : détérioration grave en cours de tt d’une forme sévère ne répondant pas à la ciclosporine, mégacolon toxique, signes de perforation, hémorragie massive
  • Elective : cancer colorectal, formes réfractaires
  • Prophylactiques : dysplasies de haut grade, à discuter pour les dysplasies de bas grade

 

DEPISTAGE DU CANCER COLORECTAL

 

Coloscopie après 15 ans d’évolution (8 ans en cas de colite au-delà de l’angle G) avec > 32 biopsies étagées du caecum à l’anus → à répéter tous les 1-2 ans (dans les 3-6 mois si une dysplasie a été identifiée). Une colectomie est indiquée si : dysplasie  de bas grade persistant sur 2 coloscopies/ dysplasie de bas grade multifocale ou associée à une lésion endoscopique/ dysplasie de haut grade/ cancer.

 

PRONOSTIC

 

Evolution imprévisible. Seuls 10% ne présentent pas de poussées dans les 25 ans suivant le diag. Le risque d’une poussée dans l’année après le diag est de 50%, de 30% après une poussée et de 20% dans les deux ans après une poussée. Le risque de colectomie à 25 ans est de 30%. Le taux de mortalité est voisin de celui de la population générale.