Polyarthrite rhumatoïde

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Connectivite auto-immune à prédominance synoviale d'origine inconnue. Prévalence de 0,25-0,5%, incidence de 9/100.000 hab/ an, le plus fréquent des rhumatismes inflammatoires, 3F > 1H, début à tout âge, pic à 40-50 ans. Le challenge réside dans un diag précoce (l'atteinte articulaire érosive non/ tardivement traitée entraînant une dégradation fonctionnelle importante irréversible alors que, rarement, les atteintes systémiques peuvent mettre en danger le pronostic vital), le suivi de l'évolutivité et la maîtrise des complications iatrogènes.

Physiopathogénie

On incrimine des facteurs déclenchants (facteurs hormonaux – la grossesse s'accompagne svt d'une rémission –  ? Infections à mycobactéries/ E. coli/ EBV/…? Tabagisme ?) sur un terrain génétique prédisposé.

Facteurs déclenchants → orage inflammatoire avec prolifération de synoviocytes macrophagiques → néo-angiogénèse et prolifération cellulaire → boucles rétro-actives entretenant la libération de nbx médiateurs inflammatoires → amplification du phénomène et destruction osseuse sous-chondrale.

Clinique

Diagnostic précoce

  • Formes typiques
    • Polyarthrite distale bilatérale, symétrique, fixe (> 6 sem)
      • D+ articulaire réveillant la nuit en l'absence de mouvement et/ ou dérouillage matinal (perdure rarement toute la journée), prédominance nocturne et matinale
      • Gonflement visible/ palpable articulaire, d+ à la mobilisation et à la pression des jointures
      • Au moins 4 articulations touchées
    • +- Inflammation des gaines synoviales : ténosynovites des fléchisseurs, parfois canal carpien
    • +- fébricule, asthénie, amaigrissement dans les formes intenses
  • Formes atypiques :
    • Oligoarthrite de la femme jeune (DD : LED, vasculite débutante)
    • PR débutante des > 65 ans (DD : Horton, PPR)
    • Formes juvéniles (DD : arthrites chroniques juvéniles)
    • Polyarthrite aiguë (20%) : début brutal, inflammation intense
    • Monoarthrite chroniques (5%) du genou/ poignet
    • Rhumatisme palindromique caractérisé par des arthrites très inflammatoires spontanément régressives en qq h/j et récidivantes à intervalles réguliers, accès le plus svt monoarticulaire/ parfois oligoarticulaire
    • Présence de signes extra-articulaires

Phase d'état

  • Arthralgies inflammatoires (au repos, ++ la nuit, augmente en poussées), peuvent devenir mécaniques (reflet de la destruction ostéo-articulaire)
  • Raideur articulaire maximale au matin, dédant après une période de dérouillage
  • Gonflement articulaire
  • Incapacité fonctionnelle
  • Déformations ostéo-articulaires invalidantes (mains et poignets, pieds, rachis cervical et articulations temporo-mandibulaires,…

Signes extra-articulaires

  • Nodules rhumatoïdes (15%) : tuméfactions sous-cutanées fermes et indolores, ++ péri-olécraniennes/ mains/ tendons d'Achille. Très rarement viscéraux (poumons, valves cardiaques)
  • Vasculites rhumatoïdes (PR graves) :
    • Artérite digitale avec syndrome de Raynaud, micro-infars péri-unguéaux, nécroses digitales
    • Vasculite rhumatoïde (par dépôts de complexes immuns dans la paroi vasculaire ?) touchant les artères de petit et moyen calibre : purpura vasculaire, ulcères, lésions nécrotiques, mono/multinévrites, atteinte mésentérique/ rénale.
  • Manifestations hémato : anémie inflammatoire, syndrome de Felty (= PR + splénomégalie + leuconeutropénie +- anémie/ thrombopénie/ adp) avec risque d'infections sévères, leucémie à grands lymphocytes granuleux, adp superficielles isolées
  • Manifestations neuros : compression médullaire cervicale, neuropathies périphériques (par compression/ vasculite)
  • Manifestations pleuro-pulmonaires : pleurésie rhumatoïde (liquide inflammatoire avec prédominance de lymphocytes), nodules rhumatoïdes pulmonaires, syndrome de Caplan-Colinet (PR + nodules rhumatoïdes + silicose), pneumopathie interstitielle diffuse (20% en comptant les formes infra-cliniques) pouvant évoluer vers une fibrose, bronchiectasies fqtes mais rarement symptomatiques, bronchiolites oblitérantes (simples ou BOOP) rares mais graves
  • Manifestations cardiaques : péricardite fqte mais rarement symptomatique
  • Manifestations oculaires : sclérite, parfois ulcérante
  • Syndrome de Sjögren (associée à 15% des PR) : xérophtalmie + xérostomie
  • Amylose AA secondaire (5%) touchant surtout le foie, la rate et les reins

Examens complémentaires

  • Biologie : VS et CRP élevées, anémie inflammatoire possible, GB N, FR + (50% d'emblée, 80% à 2 ans, peu Sp [87%]) significatif si min 1/80 en latex ou 1/64 en Waaler-Rose, Ac anti-CCP (Sp = 95-99%, Se = 40-50%), négativité des Ac antinucléaires (+ dans 20%) significatif si min 1/160/ anti-ADN natif, pas d'hypocomplémentémie sérique. + numération-formule + transaminases + créat + tigette urinaire
  • Ponction d'épanchements articulaires : liquide inflammatoire stérile et sans cristal
  • Biopsie synoviale : uniquement dans les formes atypiques/ en cas de DD difficile
  • RX systématiques des mains-poignets et avant-pieds + des articulations douloureuses
    • En phase précoce : N/ déminéralisation épiphysaire en bande +- épaississement des parties molles
    • Destruction débutant par érosions marginales et pincements d'interlignes articulaires
  • Echo/ IRM articulaires

Critères diagnostiques (ACR)

Critères classiques ayant une très faible sensibilité aux stades précoces… → le diagnostic reste difficile, doit être ré-évoqué régulièrement (il n'est pas rares que les patients soient longtemps étiquetés atteints de pathologies fonctionnelles, de diagnostics d'exclusion ou de diagnostics erronés évoqués sur base d'incidentalomes aux examens complémentaires) et avant tout basé sur l'exclusion des autres causes de polyarthrites.

  • Raideur matinale d'au moins 1h avant amélioration maximale depuis > 6 mois
  • Arthrite de > 3 régions articulaires sur 14 (IPP, MCP, MTP, poignets, coudes, genoux et chevilles) depuis > 6 semaines
  • Arthrite des articulations de la main (IPP, MCP, poignets) depuis > 6 semaines
  • Arthrite symétrique d'au moins une région articulaire depuis > 6 semaines
  • Nodules rhumatoïdes
  • Facteur rhumatoïde +
  • Signes radiographiques : érosions ou décalcifications osseuses au voisinage des articulations atteintes

Les diagnostics différentiels à exclure en urgence sont : arthrite septique, endocardite bactérienne, vasculites (++ PAN), LED.

Suivi et évaluation de l'activité de la maladie

DAS28

ACTIVITE PR

DIMINUTION DU DAS28 SOUS TRAITEMENT - REPONSE

> 1,2

0,6 – 1,2

< 0,6

< 2,6

Rémission

Bonne

Modérée

Nulle

2,6 – 3,2

Faible

3,2 – 5,1

Modérée

Modérée

Modérée

Nulle

> 5,1

Elevée

Modérée

Nulle

Nulle

Le suivi est clinique (EVA, état fonctionnel, durée du dérouillage matinal < 20 min, nbre de réveils nocturnes, palpation de 28 articulations [MCP, IPP, poignets, coudes, épaules, genoux], asthénie), biologique (VS, CRP) et radiologique (1 RX pieds et mains/ an en cas de PR active). Il existe un algorithme disponible donnant une valeur de l'activité de la maladie utilisé pour le suivi et la décision thérapeutique : le DAS28 (tient compte de : nbre d'articulations douloureuses/ 28, nbre d'articulations gonflées/ 28, VS, évaluation par le patient de l'activité de sa maladie de 0 à 100)

Traitements

Médicamenteux

  • Symptomatiques en crise :
    • Antalgiques : paracétamol +- codéine/ dextropropoxyphène, tramadol. Peu d'efficacité de la morphine. Association ou rotation avec des AINS (++ anti-Cox2)
      • Corticoth (prednisone < 7,5mg/j à réduire progressivement au max) en 2ème intention ou d'emblée en cas de poussée très inflammatoire (+ régime riche en Ca-vit D, K+ et protéines + pauvre en sel +- protection gastrique et bisphosponates)
  • Traitements de fond le plus précoce possible
    • Méthotrexate 7,5-20mg 1x/sem PO/SC = GOLD STANDARD en 1ère intention
      • CI : insuffisance hépatique/ rénale sévère, leucopénie, (désir de) grossesse/ allaitement, infection → bilan préth hémogramme + hépatique + créat + β-hCG + albumine + RX thorax. Biol de contrôle 1x/15j les 3 1er mois puis 1x/mois
      • + acide folique 5-10 mg 24-48h après la prise + contraception efficace !
    • Alternatives (ou en association):
      • Léflunomide 10-20 mg/j
      • Sulfasalazine : commencer par 1g/j à augmenter hebdomadairement jusqu'à 2-3g/j
      • Hydrochloroquine : n'a pas démontré son efficacité à retarder l'atteinte structurale, peu utilisé sauf si besoin d'une association large ou de doute avec un LED
  • Traitement de fond complémentaire/ en cas d'atteintes sévères SN : biothérapies :
  • Anti-TNF (prescription par un  rhumatologue)
    • Infliximab
    • Etanecerpt
    • Adalimumab
    • CI : infections chroniques, atcdts d'infection grave/ récurrente/ de Tbc mal ou non ttée, diabète non équilibré ou autre patho prédisposant aux infections, néo datant de < 5 ans, IC congestive, maladies démyélinisante, névrite optique, grossesse, allaitement

Schéma de tt d'une PR évoluant depuis < 6 mois :

PR.png

En cas d'atteinte viscérale/ d'atteinte articulaire évoluant depuis > 6 mois avec destructions ostéo-articulaires : référencement le plus rapidement possible au rhumatologue.

Traitements locaux

  • En cas d'articulation réfractaire à un tt de fond bien conduit et par ailleurs efficace : infiltrations par des corticoïdes locaux retards → si échec : synoviorthèse isotopique

Traitements chirurgicaux

  • Au stade tardif d'une PR destructrice éteinte : arthroplasties des grosses articulations, arthrodèses antalgiques, synovectomies (à discuter à un stade intermédiaire pour l'épaule/ chevilles/ poignets.

Traitements para-médicaux

  • Kiné, impérativement en dehors des périodes inflammatoires
  • Physiothérapie antalgique
  • Ergoth (règles d'économie articulaire, atteles de repos nocturnes pour minimiser la survenue de déformations, objets ergonomiques adaptés)
  • Soutien psychologique et assistance sociale si nécessaire