Maladie de Whipple

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La maladie de Whipple est secondaire à une infection à Tropheryma Whippelii (bacille gram positif, actinomycète, retrouvé dans des eaux d’égouts), chronique et multisystémique dont le mode de transmission reste inconnu (ingestion d’eau contaminée ? Transmission iatrogène par gastroscope ?). Elle est exceptionnelle. Environ 85% des cas rapportés sont des hommes, principalement des cinquantenaires (mais les cas rapportés s'étalent de 4 à 77 ans), quasi-exclusivement caucasiens. Aucun facteur de risque n'a été identifié.

Sa physiopathologie reste obscure (facteurs immunologiques ?).

Au vu du caractère polymorphe et de la rareté de cette maladie, son diagnostic est fréquemment méconnu ou porté tardivement... alors que l'évolution est liée à la précocité de l'antibiothérapie... et est toujours fatale en l'absence de traitement.

Les atteintes neurologiques de la maladie (neuro-Whipple) sont discutées dans un chapitre spécifique.

Clinique

La symptomatologie est très variable, pouvant simuler une origine fonctionnelle, une autre infection ou une pathologie inflammatoire. L'évocation diagnostique est difficile et justifiée dans un contexte inflammatoire devant l’association inexpliquée de :

  • Diarrhées (72 à 85%)
  • Douleurs abdominales (23 à 72%)
  • Amaigrissement (85 à 100%)
  • Arthralgies (65 à 90%)

Cependant, la sémiologie digestive est généralement tardive (fréquemment 10 à 20 ans après le début des signes généraux) et absente dans 15% des cas. On peut également retrouver des épisodes fébriles inexpliqués (20 à 55%), des symptômes neurologiques inexpliqués (20 à 40%), des manifestations cardio-vasculaires (20 à 50% : endocardite, péricardite, myocardite, coronopathie,…), une hépato-splénomégalie, des arthrites non érosives,…

Il existe 3 grands tableaux cliniques :

Maladie de Whipple classique (poly-viscérale)

  • Amaigrissement et diarrhées dans un contexte de malabsorption
  • Arthralgies
  • Adénopathies
  • Eventuellement associée à des lésions cérébrales, cardiaques ou d'autres organes (l'atteinte de tous les organes a été décrite)

L'endocardite à hémocultures négatives isolée

Le diagnostic est alors extrêmement difficile à évoquer et à établir (il nécessite l'examen histologique de la valve cardiaque atteinte).

Les formes neurologiques isolées

  • Elles se présentent fréquemment sous forme de démences progressives de diagnostic très difficile.
  • D'autres signes neurologiques très variables sont possibles : parésies, troubles oculomoteurs, myoclonies, atteinte hypothalamique, syndrome pyramidal ou cérébelleux,…

Biologie

Anomalies possibles :

  • Fréquente augmentation de la vitesse de sédimentation (VS) et des protéines inflammatoires. PCR parfois positive
  • A un stade évolué, on peut mettre en évidence des signes de malabsorption : anémie, hypoalbuminémie, hypocalcémie

Principaux diagnostics différentiels

Le diagnostic différentiel est variable selon la présentation clinique. De manière générale, les principaux diagnostics à écarter sont cependant :

  • Sarcoïdose
  • Tuberculose systémique
    • D'autant pus que la clinique d’une maladie de Whipple peut s’améliorer spectaculairement sous traitement antituberculeux. Cependant, dans ce cas, la rechute est la règle à l'arrêt du traitement.
  • Lymphome
  • Histoplasmose systémique
  • Pseudo-Whipple (mycobacterium avium intracellulaire chez les sidéens)
  • Macroglobulinémie

Diagnostic : histologie et PCR

Ces examens sont à réaliser en cas de suspicion de maladie de Whipple, sur biopsie duodénale distale (ou jéjunale) [risque d’être négative si le patient est traité par antibiotiques] ou en cas de suspicion de maladie de Whipple localisée sur biopsie des tissus suspects (liquide synovial, valve cardiaque, disque intervertébral, liquide céphalo-rachidien, cerveau, ganglions, synovie, humeur aqueuse du globe oculaire,…). Le liquide céphalo-rachidien doit, dans tous les cas, également être systématiquement analysé (PCR) en cas de Whipple confirmé sans atteinte neurologique clinique vu la fréquence des atteintes neurologiques et la clinique apparaissant souvent tardivement.

  • Immunohistochimie
    • Infiltration macrophagique avec des granulations coloration PAS positives
    • Parfois : mise en évidence de bacilles gram positifs extracellulaires
    • Possible visualisation de bacilles intracellulaires en microscopie électronique
  • PCR

On définit selon les résultats :

  • PAS et PCR positives : maladie de Whipple certaine
  • PAS ou PCR positive : maladie de Whipple possible
  • PAS et PCR négatives : maladie de Whipple exclue

Traitements et pronostic

La maladie est spontanément fatale. Divers schémas antibiotiques sont employés de manière efficace, le taux de rechute étant de 10 à 35%... mais dans ce cas, la reprise du même traitement conduit le plus souvent à la guérison.

Exemple de schéma :

  • Formes systémiques sans atteinte cardiaque ou neurologique : sulfaméthoxazole/ triméthoprime 160/ 800 mg 2 x/ jour (Bactrim Forte) durant 12 à 18 mois.
  • Formes sévères ou endocardite : ceftriaxone 2 g IV 1 x/ jour ou pen G 2 MU IV 6 x/ jour durant 4 semaines puis sulfaméthoxazole/ triméthoprime 160/ 800 mg 2 x/ jour (Bactrim Forte) durant 12 à 18 mois + discuter la résection chirurgicale de la valve infectée le cas échéant
  • Neuro-Whipple (y compris les formes asymptomatiques avec PCR positive dans le liquide céphalo-rachidien) : ceftriaxone 2 g IV 1 x/ jour ou pen G 4 MU IV 6 x/ jour durant 4 semaines puis sulfaméthoxazole/ triméthoprime 160/ 800 mg 2 x/ jour (Bactrim Forte) durant 12 à 18 mois.
  • En cas de rechute : même traitement mais doubler la dose de ceftriaxone. En cas de nouvelle rechute, envisager des cures répétées de ceftriaxone.
  • En cas d'allergie au bactrim : le remplacer par doxycycline 100 mg 2 x/ jour + hydroxychloroquine 200 mg 3 x/ jour
  • En cas d'allergie au ceftriaxone et à la pen : remplacer par bactrim forte 3 co/ jour + streptomycine 1 g/ jour IM

Auteur(s)

Dr Shanan Khairi, MD