Hypertension artérielle

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L'hypertension artérielle (HTA) est définie comme une tension artérielle (TA) s'élevant au-delà de valeurs définies de telle manière que les bénéfices d'un traitement hypotenseur soient considérés comme suffisant par la société pour justifier son coût. Alors que le risque cardio-vasculaire est majoré dès 115/ 75 mmHg, on définit donc arbitrairement :

 

Tension artérielle systolique (TAS) en mmHg

Tension artérielle diastolique (TAD) en mmHg

TA normale

< 130

< 85

TA normale haute

130-139

85-89

HTA légère = stade 1

140-159

90-99

HTA modérée = stade 2

160-179

100-109

HTA sévère = stade 3

> 180

> 110

La tension artérielle = débit cardiaque (contractilité, fréquence cardiaque, précharge) x résistances vasculaires périphériques (viscosité sanguine, diamètre artères distales)

L'hypertension artérielle concerne 10 à 25% des adultes et 60 à 70% des plus de 70 ans. Seuls 70% des cas sont diagnostiqués, 50% traités et 25% correctement contrôlés. Facteur de risque cardio-vasculaire majeur, son dépistage et sa maîtrise constituent un enjeux majeur de santé publique.

Etiologies

Hypertensions artérielles "essentielles" (90 à 95% des cas)

Il s'agit d'une affection multifactorielle :

  • Part génétique (antécédents familiaux cardiaques et rénaux) et facteurs non modifiable (sexe, âge, niveau socioéconomique, noirs)
  • Facteurs environnementaux : régime riche en sodium et pauvre en potassium, sédentarité, alcool, tabac, stress, diabète mal contrôlé, régime riche en graisses

Hypertensions artérielles secondaires (5 à 10% des cas)

  • Hypertension artérielle rénale :
    • Hypertension rénovasculaire (sténose des artères rénales ou dysplasie fibromusculaire)
      • A évoquer cas de créatininémie supérieure à 1,5 mg/ dl ou augmentant sous inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC), en cas d'hypertension artérielle réfractaire ou s'aggravant brutalement, chez les personnes âgées, en présence d'un souffle abdominal, de survenue d'oedèmes pulmonaires hémodynamiques brutaux et florides
    • Pyélonéphrite chronique, glomérulonéphrites, reins polykystiques, tumeurs à rénine
  • Hypertensions artérielles endocriniennes (syndrome de Cushing et de Conn, syndromes adrogénitaux, phéochromocytome, dysthyroïdies, acromégalie)
  • Coarctation aortique
  • Iatrogène : contraception orale (COC), antalgiques, corticoïdes, érythropoïétine (EPO), réglisse, anorexigènes, immunosuppresseurs, anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS),…
  • Divers : psychogène, neurogène, syndrome des apnées du sommeil, asthme, bronchopneumopathies chronique obstructive (BPCO), drogues, alcoolisme chronique,…

Clinique et complications d'une hypertension artérielle non contrôlée

L'HTA est le plus souvent longtemps asymptomatique. Elle peut évoluer vers la survenue d'épisodes peu spécifiques de : céphalées chroniques, vertiges, dyspnée, épistaxis,… Des présentations atypiques sont possibles (y penser par exemple en cas de survenues d'épisodes de déficits neurologiques transitoires récidivants avec une imagerie cérébrale normale).

Les complications (généralement au côté d'autres facteurs de risque) sont par contre la règle au long cours :

  • Hypertrophie ventriculaire gauche (HVG)
  • Insuffisance cardiaque chronique
  • Insuffisance rénale chronique
  • Coronopathies
  • Accidents vasculaires cérébraux (AVC) hémorragiques et ischémiques, encéphalopathies hypertensives
  • Anévrismes et dissections artérielles

Mise au point diagnostique et étiologique

Examen clinique

Le diagnostic nécessite classiquement au moins 2 mesures de tension artérielle aux 2 bras. Cependant, 15% des "hypertensions artérielles" au cabinet sont des "effets blouses blanches" et 20% des réelles hypertension artérielles ne sont pas détectées en cabinet → intérêt du holter tensionnel de 24 heures (monitoring ambulatoire de pression artérielle - MAPA).

Rechercher des signes de coarctation aortique (asymétrie tensionnelle, diminution des pouls), recherche d'une hypotension orthostatique à 1 et 5 minutes, aspect général (cushingoïde, lésions cutanées, force), auscultation et palpation des carotides, palpation de la thyroïde, recherche d'oedèmes des membres inférieurs, prise de la fréquence cardiaque, recherche de souffles (cardiaque, aortique, carotidien, artères rénales), de ronchis et râles pulmonaires, de masses rénales,…

Hypertension artérielle (HTA) - diagnostic

A noter que la tension artérielle (surtout sa composante systolique) augmente physiologiquement en cas d'exercice physique et de stress. Il n'y a pas de donnée validée quant à un seuil dans ces situations qui soit prédictif d'une vraie hypertension artérielle. Il convient donc de ne jamais conclure à un diagnostic d'HTA face à une tension même très élevée dans un contexte de stress physique ou psychologique aigu mais d'en vérifier l'évolution au décours ou de prévoir un MAPA à distance.

Biologie minimale

Hématogramme, Hb glyquée, ionogramme, fonction rénale, urates, lipides

Tigette urinaire, examen microscopique des urines et recherche de micro-albuminurie

Electrocardiogramme

Recherche en particulier de signes d'une hypertrophie ventriculaire gauche (HVG). Eventuellement complété par une échographie cardiaque.

Fond d'œil

En cas d'hypertension artérielle sévère. Rétinopathie hypertensive ?

Holter tensionnel de 24 heures (MAPA)

Il permet tant de réduire le nombre de faux positifs ("effet blouse blanche") que de faux négatifs (en particulier concernant l'HTA nocturne), de préciser la sévérité de l'HTA et d'en analyser divers facteurs pronostiques (variabilité, étude nocturne / diurne,...).

Son usage tant pour le diagnostic que le suivi tend à se généraliser.

Auto-mesures

Trois mesures successives en position assise matin et soir pendant 3 jours. HTA si moyenne > 135/ 85 mmHg. Très peu fiable, à abandonner.

Anamnèse et évaluation du risque cardio-vasculaire

 

TA normale

TA normale haute

HTA stade 1

HTA stade 2

HTA stade 3

Pas d'autre facteurs de risque (FR)

Normal

Normal

Risque faible

Risque moyen

Risque élevé

1 à 2 FR

Risque faible

Risque faible

Risque moyen

Risque moyen

Risque très élevé

> 3 FR ou atteinte des organes cibles ou diabète

Risque moyen

Risque élevé

Risque élevé

Risque élevé

Risque très élevé

pathologie cardio-vasculaire ou rénale avérée

Risque très élevé

Risque très élevé

Risque très élevé

Risque très élevé

Risque très élevé

  • Autres facteurs de risque cardio-vasculaires : homme de plus de 55 ans, femme de plus de 65 ans, antécédents familiaux (de début de moins de 55 ans pour les père ou frères, de moins de 65 ans pour les mère ou sœurs), tabagisme, dyslipidémie (LDL augmenté, HDL diminué, cholestérol total augmenté), sédentarité, indice de masse corporelle (IMC) supérieur à 25, éthylisme chronique
  • Recherche d'atteintes des organes cibles : rétinopathie hypertensive, artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI), anévrismes disséquants, AVC, HVG et insuffisance cardiaque, syndromes coronariens.
  • Risque élevé → plus de 20% d'évènement cardio-vasculaire à 10 ans
  • Risque très élevé → plus de 30% d'événement cardio-vasculaires à 10 ans
  • S'aider également des scores de risque cardio-vasculaires (ex : heartscore)
  • Toujours exclure des causes toxiques ou iatrogènes par l'anamnèse.

Bilan étiologique

L'immense majorité des HTA étant "essentielle", une recherche étiologique ne fait pas partie du bilan standard d'une HTA. Indications : anamnèse ou clinique suggérant une HTA secondaire, HTA sévère, HTA réfractaire ou en aggravation subite, HTA avec atteinte des organes cibles semblant disproportionnée. A discuter également en cas d'HTA débutant avant la puberté ou après 50 ans.

Sont particulièrement évocateurs : dégradation de la fonction rénale, protéinurie, hématurie, femme jeune (HTA d'origine rénale ++), kaliémie inférieure à 3,5 mEq/ l ou (3 mEq/ l sous diurétiques - hyperaldostéronisme ?), palpitations, HTA associée à des céphalées chroniques, transpiration profuse, perte de poids inexpliquée, HTA labile, hypotension artérielle orthostatique (iatrogènes, toxiques, phéochromocytome), diminution des pouls fémoraux ou asymétrie tensionnelle (coarctation aortique).

Selon les degrés de suspicion, le bilan comprendra alors :

  • Echographie doppler ou angio-CT-scan ou angio-RM rénale
  • Avis néphrologique
  • Biologie : aldostérone, rénine (les éventuels traitements hypotenseurs doivent être arrêtés depuis 1 semaine), métanéphrines, TSH, IGF 1
  • Cortisolurie de 24 heures + ionogramme urinaire + protéinurie + métanéphrines
  • CT-scanner des surrénales
  • CT-scanner thoracique

Divers selon contexte

Echographie-doppler des vaisseaux du cou, tests d'efforts, index bras-cheville (ABI), fonds d'oeil (FO), IRM cérébrale, IRM cardiaque,…

Prise en charge thérapeutique de l'HTA essentielle - Traitements

Objectifs :

  • En cas de protéinurie > 1 g/ jour : < 125 / 75 mmHg
  • En cas de diabète, d'insuffisance rénale ou de protéinurie < 1 g/ jour : < 130 / 80 mmHg
  • Autres cas : < 140 / 90 mmHg
  • Pas de guide-lines clair pour les patients gériatriques. Il est probable que le bénéfice à traiter soit en général équivalent à celui des plus jeunes, mais le risque plus important d'effets iatrogènes - particulièrement chez les patients déjà polymédiqués ou. présentant des déficits cognitifs - conduit fréquemment à une plus grande "tolérance tensionnelle".

Suivi mensuel jusqu'à normalisation de la tension (plus longtemps en cas d'HTA de stade 3 ou compliquée). Ensuite : contrôle tous les 3 à 6 mois avec dosage de la kaliémie et de la créatininémie 1 à 2 x/ an. En cas d'HTA mal contrôlée ou d'atteinte des organes cibles, suivi tous les 1 à 3 mois.

Mesures générales (= idem prévention primaire)

  • Toujours : arrêt du tabac, réduction de l'alcool, exercice physique modéré 30 minutes/ jour adapté à l'âge et aux co-morbidités (marche, course, natation, vélo), régime pauvre en sodium (< 6 g/ jour) et riche en potassium (fruits et légumes), normalisation du poids sous 25 d'IMC, régime pauvre en graisses saturées.
  • En cas d'hypercholestérolémie associée : statines
  • En cas de diabète associé : contrôle rigoureux

Traitement médicamenteux

A débuter d'emblée en cas de risque cardio-vasculaire élevé à très élevé ou d'HTA de grade 2 ou 3. A débuter après 3 mois d'échec des mesures générales et confirmation par MAPA dans les autres cas. A plus de 80 ans, ne pas traiter une HTA de grade 1. Ne pas traiter l'HTA systolique isolée du jeune homme en bonne santé (mais le suivre régulièrement).

Principes généraux :

  • Deux stratégies possibles :
    • Monothérapie faible dose (++ si HTA grade 1 ou 2 et risque cardio-vasculaire faible à modéré) → en cas d'échec : augmenter la dose ou essayer un autre médicament → en cas d'échec : augmenter le nombre de médicaments jusqu'à 3 avec évaluation mensuelle jusqu'à obtention de la TA désirée.
    • Bithérapie faible dose d'emblée (++ si HTA grade 3 et/ ou risque cardio-vasculaire haut ou très haut) → en cas d'échec : augmenter les doses ou rajouter un 3ème médicament → en cas d'échec : trois médicaments à doses maximales
  • 60% des patients ont besoin de > 2 médicaments pour être contrôlés
  • Ne jamais associer un β-bloquant à un anticalcique de type vérapamil (ils diminuent tous deux la conduction cardiaque, l'association avec la nifedipine ne pose pas de problème)
  • Toujours tenir compte des contre-indications et pathologies associées :
    • Absence de contexte particulier : préférer des combinaisons entre IEC/ sartan, anticalciques, thiazidiques
    • Insuffisance cardiaque à FEVG diminuée : ++ diurétiques de l'anse et inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC) / sartan, β-bloquant, antagonistes des récepteurs aux minéralo-corticoïdes (ARM) – éviter les anticalciques
    • Insuffisance cardiaque à FEVG conservée : anticalciques de type vérapamil
    • Hypertrophie ventriculaire gauche : ++ IEC/ sartan, anticalcique
    • antécédent d'infar/ tachyarythmies : ++ β-bloquants, IEC/ sartan
    • Angor : β-bloquants, anticalcique
    • Anévrisme aortique : β-bloquants
    • Protéinurie / micro-albuminurie : IEC/ sartan
    • AOMI : IEC, anti-calcique
    • Troubles de la conduction : éviter le vérapamil et les β-bloquants
    • Si un β-bloquant est nécessaire en l'absence d'antécédent de coronopathie et de tachyarythmies, préférer le nobiten (action plus marquée sur la tension, moins sur la conduction cardiaque)
    • IRC : IEC, antagoniste de l'angiotensine II (ARB)
    • Hypertrophie bénigne de la prostate : ++ α1-bloquants
    • Diabète/ goutte : ++ IEC et ARB à préférer aux anticalciques, éviter les diurétiques
    • HTA systolique isolée : ++ diurétiques thiazidiques
    • Patients âgés : ++ diurétiques thiazidiques/ anticalciques
    • Patients noirs : diurétiques et anticalciques
    • AVC : ++ anticalcique en aigu, ++ thiazidiques et IEC en prévention des récidives
    • Asthme, BPCO, blocs auriculo-ventriculaires (BAV) 2 ou 3, athlètes : éviter les β-bloquants
    • Risque cardio-vasculaire élevé/ très élevé : ++ IEC
    • Grossesse ou sténose bilatérale des artères rénales ou hyperkaliémie : pas d'IEC ou sartan

Cibles désirées pour traiter une HTA :

  • TAS < 160 mmHg chez les > 80 ans
  • TAS < 140 mmHg chez autres patients
  • TAD < 90 mmHg (< 85 mmHg chez les diabétiques si bien toléré)

Une TA normale haute ne nécessite aucune intervention en l'absence d'autres facteurs de risque cardio-vasculaire. Sinon, seulement mesures hygiéno-diététiques.

Hypertension artérielle (HTA) - associations thérapeutiques à privilégier

On définit une hypertension artérielle réfractaire en cas de cibles non atteintes avec compliance aux mesures générales sous une trithérapie comprenant un diurétique → s'assurer de la compliance, envisager l'adjonction d'un ARM, d'amiloride ou d'un alpha-1-bloquant → envisager une procédure interventionnelle (dénervation rénale) si persistance d'une HTA de grade 2 ou 3.

En cas de polythérapie, préférer les associations selon le schéma ci contre :

Prise en charge thérapeutique des hypertensions artérielles secondaires

Un traitement étiologique entraîne rarement la suppression de l'HTA mais fréquemment une nette amélioration. En cas de sténose des artères rénales symptomatique ou supérieure à 60% ou avec insuffisance rénale et de traitement endovasculaire ou chirurgical impossible, préférer les IEC et anti-calciques en cas de sténose unilatérale (contre-indications si sténose bilatérale).

Hypertension artérielle maligne et urgences hypertensives

Une urgence hypertensive est définie comme l'installation rapide d'une TAS > 180 mmHg ou d'une TAD > 120 mmHg avec des répercussions organiques (rétinopathie hypertensive [troubles visuels], encéphalopathie hypertensive, AVC, insuffisance ventriculaire +- OPH, angor, IRA, microangiopathie thrombotique avec anémie hémolytique,...). Plus que l'importance de l'HTA, ce sont la rapidité de son installation et la clinique qui traduisent le mieux sa sévérité. Différente d'une HTA sévère (pas de répercussion organique bien que possiblement symptomatique - palpitations, douleurs précordiales, céphalées, vertiges... mais sans lésion organique) qui n'impose qu'une majoration ou reprise du traitement habituel ou un anxiolytique selon les cas et une consultation dans les 48 heures.

Survient le plus souvent dans le cadre d'une HTA essentielle non ou mal traitée mais révèle une HTA secondaire (++ rénovasculaire) dans un tiers des cas.

Complications

  • Dissection aortique (2%)
  • Accidents vasculaires cérébraux (hémorragiques > ischémiques), encéphalopathie hypertensive (16%, par œdème cérébral diffus ou syndrome d'encéphalopathie postérieure réversible [PRES syndrome]… qui n'est pas toujours réversible…)
  • Insuffisance cardiaque aiguë (37%), syndromes coronariens aigus ou cardiomyopathie de stress (12%)
  • Insuffisance rénale aiguë
  • Eclampsie (femmes enceintes)

Mise au point

Evaluation diagnostique, de la sévérité et dépistage des complications : plusieurs mesures de la TA, anamnèse, examen clinique (!! à la dissection aortique), biologie (ionogramme, schistocytes, BNP, fonction rénale, tropos, hémato-CRP), tigette urinaire, EMU, ECG, FO. CT ou IRM cérébral en cas de trouble neurologique (AVC ou encéphalopathie hypertensive ?).

Traitement

De façon générale, ne diminuer la TA que progressivement (les principaux facteurs de mortalité sont une absence de traitement ou… un traitement trop agressif). La survenue de certaines complications (insuffisance cardiaque aiguë, dissection aortique) impose cependant de réduire rapidement et drastiquement la TA.

Si symptomatique ou altération biologique signicativeurgence hypertensive jusqu'à preuve du contraire :

  • HOSPITALISATION → prise en charge et surveillance minimum 24 heures sous monitoring, idéalement dans une UC
    • En cas de signes neurologiques ou de céphalées → attendre les résultats du CT-scan cérébral et FO !!!
    • De manière générale : réduire lentement la TA de 25% puis viser graduellement < 160/ 110 mmHg
    • Associations selon contexte :
      • Absence de contexte particulier : nicardipine/ labétolol
      • Dissection aortique/ AVC : labétolol (+ nitroprussiate si insuffisant +- anticalciques)
        • En cas d'AVC, les normes de traitement sont différentes :
          • AVC HH : traitement si TAS > 180 mmHg ou TAM > 130 mmHg
          • AVC ischémique :
            • Pas de thrombolyse : traitement si TAS > 220 mmHg ou TAM > 120 mmHg, viser une chute tensionnelle de 15%
            • Thrombolyse considérée : obtenir avant thrombolyse et maintenir ensuite une TA < 180/ 105 mmHg
      • Décompensation cardiaque : dérivé nitré, furosémide + IEC (pas de béta-bloquants!)
      • Encéphalopathie hypertensive : éviter les antihypertenseurs centraux
      • IRA : IEC, furosémide/ labétolol/ antiCa
      • (pré)-éclampsie : labétolol + Mg
      • Angor/ infarctus : dérivé nitré + béta-bloquant (éviter anticalciques/ hydralazine) +- IEC
        • Nicardipine (Rydène) 10mg/ heure IV
        • Nitroprussiate 0,5-10 µg/ kg/ minute IV
        • Labétalol 1mg/kg puis 0,5-2 mg/ minute IV
        • Furosémide 40-80mg IV (++ si OPH)
        • Enalapril/ captopril 1,25-5 mg IV toutes les 6 heures
        • Dinistrate d'isosorbide (cedocard) 2-10 mg/ heure IV
  • Divers :
    • En cas de suspicion d'AVC ischémique : ne pas descendre la TA sous 170/100 dans les 48 1ères heures
    • En cas de dissection aortique : viser une TAS 110-120 mmHg
    • Jamais de nifédipine à action rapide (sub-lingual) (risque d'AVC ischémique et de syndrome coronarien aigu) !

Particularités de l'hypertension artérielle du patient gériatrique

Schéma des modifications cardiovasculaires physiologiques de la sénescence :

Vieillissement et système cardio-vasculaire

Il n'existe pas de consensus quant aux normes et traitement pour les patients gériatriques (risque d'AVC, de démences, de coronopathies, d'insuffisance cardiaque augmenté mais sensibilité particulière aux effets secondaires [hypotension orthostatique, incontinence,…] → équilibre difficile). Sous réserve d'une vigilance à l'apparition d'effets secondaires (risque de chutes et de fracture, qualité de vie diminuée) les patients gériatriques bénéficient autant (voire plus) d'un traitement antihypertenseurs que les autres. L'instauration d'un traitement et les normes à respecter sont donc à évaluer au cas par cas. Sous réserve des co-morbidités, privilégier les thiazidiques (toujours à préférer aux autres diurétiques), les anticalciques +- IEC ou β-bloquants.

Hypertension et grossesse

Une HTA survient chez 6 à 8% des femmes enceintes. Complications potentielles maternelles (AVC, IRA, décollement placentaire,...) et fœtales (RCIU,…).

Classification

  • HTA chronique (3 à 5% des grossesses) : connues avant la grossesse ou découverte en cours de grossesse mais persistant 3 mois après l’accouchement.
  • HTA gravidique (6% des grossesses) : découverte après la 20ème semaine d'âge gestationnelle (SAG), sans protéinurie. Transitoire si elle disparaît endéans les 3 mois post-partum, chronique sinon.
  • Pré-éclampsie (5 à 8% des grossesses) : découverte après la SAG 20 + protéinurie.
    • NB : une femme avec une HTA chronique méconnue et découverte tardivement au cours de la grossesse et présentant une protéinurie peut être confondue avec une pré-éclampsie…
    • Une véritable pré-éclampsie surajoutée se rencontre cependant chez 15 à 25% des grossesses des femmes avec HTA chroniques.
  • Eclampsie = pré-éclampsie + survenue de crises convulsives

Dans le cadre de la grossesse, on définit :

  • HTA : TAS > 140 mmHg ou TAD > 90 mmHg
  • Protéinurie : si > 300 mg/ 24 heures effectuée sur 2 échantillons prélevés à plus de 4h d’intervalle, à faire en cas de tigette positive
  • HTA sévère : TA > 160 / 110 mmHg
  • HTA compliquée : HTA associée à une néphropathie ou une HVG

HTA chronique

Avant la grossesse : rechercher des lésions organiques (créatininémie, protéinurie, échographie cardiaque). En cas de suggestion clinique ou d’HTA sévère : rechercher une HTA secondaire.

En cas d’HTA non sévère et non compliquée, le risque gravidique est faible. L'insuffisance rénale, qu’elle qu’en soit la cause, augmente en revanche le risque de complications maternelles et fœtales.

  • Mesures générales :
    • Arrêt tabac et alcool
    • Limitation des activités physique ( ! un régime hypocalorique peut être indiqué avant la grossesse, mais jamais pendant !)
    • Limitation de la consommation de caféine et de sel
  • La poursuite ou l’instauration d’un antihypertenseur doit être soigneusement discutée entre gynécologue et cardiologue ! (risque foetal de Retard de Croissance In Utero en relation directe avec la chute de tension artérielle sous traitement). Préférer la méthyldopa ou le labétalol (posologies particulières). Les IEC et les anti-angiotensines II sont en tout cas à proscrire !
    • HTA déjà traitée, non sévère et non compliquée : interrompre le traitement et le reprendre si la TA > 150/100 (la TA chute habituellement durant la 1ère moitié de la grossesse, puis réaugmente durant le 3ème trimestre), l’objectif étant alors de descendre sous 140/90 mmHg
    • HTA non traitée : initier un traitement si TA > 150/ 100 mmHg ou HTA compliquée.
  • Surveillance fœtale clinique et échographique renforcée
  • Hospitalisation et avis gynécologique en urgence en cas d'HTA sévère ou de retentissement fœtal

L’HTA chronique favorise la survenue d’une pré-éclampsie. Le traitement antihypertenseur ne prévient pas la pré-éclampsie mais le risque d’HTA sévère ou compliquée. Un suivi régulier reste donc nécessaire pour détecter une pré-éclampsie, même en cas d’HTA chronique contrôlée. Faire un bilan biologique toutes les 2 semaines (signes : anémies hémolytiques, hémoconcentration, hypoplaquettose, hypercréatininémie, hyperuricémie, protéinurie + coagulation, LDH, albumine)

La pré-éclampsie

Les signes d'alertes sont peu spécifiques et sont à confronter à leur mode de survenue ou leur conjonction et les facteurs de risque : céphalées, vision trouble, douleurs épigastriques ou de l'hypochondre droit, nausées et vomissements, œdèmes, augmentation brutale de la TA, apparition ou aggravation d’une protéinurie, altérations biologiques.

La pré-éclampsie est un syndrome materno-fœtal incluant le dérèglement de quasi-tous les mécanismes physiologiques de la grossesse, dont le facteur déclenchant  semble être une anomalie de la perfusion placentaire. Les formes les plus graves (éclampsie, HELLP syndrome) peuvent survenir en présence même d’une élévation modeste de la TA ou de la protéinurie sans corrélation à la sévérité clinique.

Facteurs de risque de pré-éclampsie identifiables en consultation pré-natale :

  • Première grossesse ou intervalle de plus de 10 ans depuis la dernière grossesse.
  • Grossesse multiple
  • antécédents persos ou familiaux de pré-éclampsie
  • Age > 40 ans
  • IMC > 35
  • TAS > 130 mmHg ou TAD > 80 mmHg
  • Protéinurie
  • Affection sous-jacente : HTA chronique, néphropathies, diabète, présence d’anti-corps anti-phospholipides

Cependant, aucun test ne permet actuellement de prédire de manière fiable la survenue d’une pré-éclampsie. Un suivi régulier est donc nécessaire (toutes les 2 semaines, cf supra + dépistage systématique du diabète gestationnel) chez toutes les femmes à risque.

Une prévention de la  pré-éclampsie ?

Aucune mesure n’a jusqu’ici été démontrée efficace. Il semble cependant logique de préconiser : réduction de l’obésité et de l’insulino-résistance en pré-partum par une alimentation adéquate, éviter les grossesses précoces et tardives, éviter les grossesses multiples lors des procréations assistées.

Certaines études ont "suggéré" que l’administration d’aspirine à petites doses et un supplément calcique chez les femmes pourrait prévenir la pré-éclampsie, les accouchements prématurés, les grossesses compliquées. Ce n'est pas validé.

Traitement de la pré-éclampsie

  • Première évaluation hospitalière
    • Si la pré-éclampsie n’est pas sévère, retour au domicile avec suivi rapproché et régime normosodé
  • Traitement antihypertenseur si TA > 150/ 100 mmHg. Ne modifie pas l’évolution de la pré-éclampsie mais réduit le risque de moitié de développer une HTA sévère.
    • En cas d’accouchement non imminent : antihypertenseurs oraux tels que méthyldopa, labétalol ou autres béta-bloquants, anticalciques. Objectif : TAS 140-150 mmHg/ TAD 90-100 mmHg.
    • En cas d’accouchement imminent ou d'HTA sévère : labétolol IV ou nifédipine per os (ou hydralazine IV, plus de complications). Objectif : TAD 95-105 mmHg avant le travail.
  • Prévention des convulsions éclampsiques en cas de pré-éclampsie sévère: sulfate de Mg (mêmes doses que pour le traitement de l'éclampsie)
  • Corticoïdes si menace d’accouchement avant la SAG 34 (maturation pulmonaire fœtale).

En fait, le seul "traitement curatif" de la pré-éclampsie reste l’accouchement. Un compromis entre la protection de la mère et la maturation du fœtus est donc nécessaire selon la clinique (souffrance materno-fœtale) et les préférences parentales. Néanmoins, rarement, on peut observer une aggravation avec convulsions après l’accouchement ([pré]-éclampsie tardive du post-partum = de 48 heures à 4 semaines après l’accouchement.

En cas de persistance d’HTA après l’accouchement, la plupart des antihypertenseurs peuvent être utilisés sans danger pendant l’allaitement, y compris les IEC. Eviter cependant l’acébutol et l’aténolol.

Informer une patiente ayant eu une pré-éclampsie qu’elle a un risque majoré de présenter dans le futur une nouvelle pré-éclampsie, une HTA chronique et des maladies cardio-vasculaires. Risque encore majoré en cas de pré-éclampsie précoce ou sévère ou de syndrome métabolique ou une de ses composantes (obésité, HTA, résistance à l’insuline, dyslipidémie). Agir préférentiellement d’un point de vue hygiéno-diététique.

L'éclampsie

Nécessite toujours un traitement en urgence :

  • Transfert en USI et prise en charge mixte intensiviste - gynécologue
  • Équilibre tensionnel + remplissage vasculaire
  • Traitement anticonvulsivant : benzos (diazépam 10-50 mg IV ou clonazépam 0,5 mg/ heure en IV continu) + sulfate de Mg (charge de 5 g = 20 mmol en IV lent puis 1 g/ heure IV à adapter selon la [Mg])
  • Extraction fœtale dès que possible

Autres complications de l'HTA gravidique

En plus des complications non spécifiques à la grossesse (OPH, AVC, IRA), on peut rencontrer :

  • HELLP syndrome :
    • = Hémolyse + ELévation des enzymes hépatiques + thrombopénie (Low Platelet)
    • = schistocytes sur frottis sanguin + bilirubinémie totale > 20,5 µmol/ l = 1,2 mg/ dl + ASAT > 70 UI/ l + LDH > 600 UI/ l + Pq < 100.000/ mm³
    • = microangiopathie thrombotique spécifique à la grossesse présentant des risques maternels et fœtaux
    • Clinique initiale : nausées, vomissements, hépatalgies
    • Complications : CIVD, OPA, insuffisance hépatique, IRA, hématome sous-capsulaire du foie
    • Traitement : accouchement provoqué, corticoïdes (dexaméthasone 2 x 10 mg IV le 1er jour puis 2 x 5 mg) + sulfate de Mg (mêmes doses que pour l'éclampsie)
  • Hématome rétroplacentaire ou décollement prématuré d'un placenta normalement inséré
  • Arythmies cardiaques fœtales, MFIU, souffrance fœtale avec hypotrophie, prématurité

Auteur(s)

Dr Shanan Khairi, MD