Encéphalopathies spongiformes transmissibles humaines (EST) - Maladies à prions

Révision datée du 7 mai 2014 à 09:41 par Shanan Khairi (discussion | contributions) (Page créée avec « = pathos neurodégénératives du SNC pouvant être sporadiques / génétiques / transmissibles. Se caractérisent par une destruction neuronale, une spongiose, une gliose et... »)
(diff) ← Version précédente | Voir la version actuelle (diff) | Version suivante → (diff)
Aller à : navigation, rechercher

= pathos neurodégénératives du SNC pouvant être sporadiques / génétiques / transmissibles. Se caractérisent par une destruction neuronale, une spongiose, une gliose et l'accumation de PrPsc. Etiologie inconnue (hypothèse du prion). Rares, incubation longue, évolution fatale sans rémission, absence de réaction inflammatoire.

 

CRITERES DIAGNOSTIQUES

 

EST SPORADIQUES (UCSF 2007 – WHO 1998)

I

Démence rapidement progressive

II

A

Myoclonies

B

Anomalies visuelles ou cérébelleuses

C

Syndrome pyramidal ou extrapyramidal

D

Mutisme akinétique

III

A

EEG typique (complexes d'ondes périodiques)

B

PR 14-3-3 positive dans le LCR d'un patient évoluant depuis < 2 ans

C

IRM positive (hyperintensités sous-corticales ou des rubans corticaux en diffusion)

IV

Absence de diagnostic alternatif aux examens de routine

Définie

Confirmation neuropathologique ou immunocytochimique ou Western Blot

Probable (UCSF)

I + 2 de II + 1 de III + IV

Probable (WHO)

I + 2 de II + III A ou III B + IV

Possible

1 + 2 de II + IV + durée de la maladie < 2 ans

 

vMCJ (UK DoH 2003)

I

A

Trouble neuropsychiatrique progressif

B

Durée > 6 mois

C

Absence d'autre étiologie suggérée par les examens de routine

D

Absence de notion d'exposition à une source iatrogène potentielle

E

Absence d'argument pour une forme familiale d'EST

II

A

Symptômes psychiatriques précoces

B

Symptômes sensitifs douloureux persistants

C

Ataxie

D

Myoclonies ou chorée ou dystonie

E

Démence

III

A

Absence d'un EEG typique d'EST sporadique

B

Signal hyperintense thalamique postérieur bilatéral à une IRM cérébrale

IV

Biopsie amygdalienne positive

Définie

I A + confirmation neuropathologique de vMCJ

Probable

I + 4 de II + III

Probable

I + IV

Possible

I + 4 de II + III A

 

EST IATROGENES (WHO 1998)

FR iatrogènes reconnus

Tt par hormone de croissance hypophysaire humaine

Greffe de cornée / dure-mère d'un donneur atteint d'une EST définie / probable

Exposition à des instruments de neurochirurgie utilisés préalablement sur un patient atteint d'une EST définie / probable

Définie

EST définie + FR iatrogène reconnu

Probable

Sd cérébelleux prédominant progressif + tt par hormone hypophysaire

Probable

EST probable + FR iatrogène reconnu

 

EST GENETIQUES (WHO 1998)

Définie

EST définie + EST définie/ probable chez 1 apparenté du 1er degré OU mutation pathogène PRNP

Probable

Trouble neuropsychiatrique progressif + EST définie / probable chez un apparenté du 1er degré OU mutation pathogène PRNP

DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL

 

Le DD initial se confond généralement avec celui d'un syndrome démentiel rapidement progressif :

 

Vasculaires

TVC/ Sidérose SNC

Infectieuses

Encéphalites virales (herpétique !)

Démence HIV

LEMP

Panencéphalite sclérosante subaiguë

Infections fongiques (immunodéprimés !)

Syphilis

Maladie de Lyme

Amibiose cérébrale

Maladie de Whipple

Toxico-Métaboliques

Endocrinopathies thyroïdiennes / parathyroïdiennes / surrénaliennes

Troubles ioniques

Carences en vitamines (B1, B3, B6, folates)

Encéphalopathie urémique / hépatique

Porphyrie

Intoxications au Bismuth, lithium, plomb, mercure, arsenic

Auto-immunes

Encéphalopathie de Hashimoto

Encéphalite limbique paranéoplasique

Encéphalite auto-immune non paranéoplasique (ex : Ac anti-VGKC)

Neurolupus

Vasculites du SNC

Sarcoïdose

Néoplasiques

Métastatases du SNC

Lymphome du SNC

Lymphome intravasculaire

Granulomatose lymphoïde

Gliomatose cérébrale

Syndromes paranéoplasiques non auto-immuns

Iatrogènes

Neuroleptiques, BZD, cholinergiques, antidépresseurs, antiHTA, stéroïdes, anti-arythmiques, antidiabétiques, antibiotiques, Chth passant la BHE, RXth panencéphalique,…

Neurodégénératives

 

 

 

Alzheimer

Démence à corps de Lewy

Démences fronto-temporales

Démences cortico-basales

Paralysie supranucléaire progressive

Divers

Maladies mitochondriales

Hydrocéphalie chronique de l'adulte

 

DD à moduler selon la clinique.

 

NOTIONS DE PHYSIOPATHOLOGIE

 

L'agent n'est pas certain → on parle d'ATNC (agent transmissible non conventionnel). Mais dans tous les cas, une forme aN de la protéine prion cellulaire, naturellement présente, s'accumule sous forme de prion "scrapie" ou "résistante" PrPres.

 

1.     SOUCHES D'ATNC

 

Se caractérisent par l'induction d'une maladie dont les caractéristiques sont reproductibles chez des animaux ayant un même fond génétique pour une même dose infectante : temps d'incubation déterminé, profil lésionnel caractéristique. D'autres caractéristiques peuvent varier selon la souche : résistance aux protocoles de décontamination, diffusion de l'infectuosité dans l'organisme, capacité à franchir la barrière d'espèces.  Plus d'une vingtaine de souches ont été isolées à partir d'EST naturelles.

 

2.     INCUBATION

 

Varie selon : la souche utilisée, la voie d'inoculation (rapidité voie intracérébrale > IV > intrapéritonéale > SC > intragastrique), la dose infectante, le génotype de l'hôte (polymorphismes du gène PrP).

 

3.     BARRIERE D'ESPECE

 

La barrière inter-espèces se traduit par un temps d'incubation plus long et un plus faible nombre de malades, voir par une absence de maladie. Cette barrière est cependant levée lors de l'introduction par transgénèse dans le génome de l'hôte la séquence de la PrP de l'espèce du donneur.

 

4.     DISTRIBUTION DE L'INFECTIOSITE

 

Infection par voie périphérique (voie la plus utilisée = intra-péritonéale) → diffusion au système réticulo-endothélial (rate (ou système lyphoïde du TD en cas d'inoculation PO) → ganglions lymphatiques et mésentériques, amygdales, thymus) → SNA → moelle thoracique → reste du SNC (détectable dans le cerveau après la seconde moitié de la durée d'incubation, possible uniquement si les cellules expriment la PrP). L'infectiosité atteint un plateau périphérique après 30-50j alors qu'elle est exponentielle jusqu'au décès dans le SNC. La splénectomie entraîne une importante augmentation du temps d'incubation. Résistance partielle des souris dénuées de LB fonctionnels ou dont le R au TNF alpha des cellules folliculaires dendritiques est neutralisé. Hypothèse que les cellules dendritiques soient une cible importante de la réplication périphérique.

 

Infection par voie intracérébrale → dissémination exponentielle dans le SNC, dépendante de l'expression de la PrP par les cellules + diffusion aux organes lymphoïdes (résidu d'inoculum passé dans la circulation ?)

 

5.     LA PrP

 

Gène localisé sur le bras court du Chr 20 chez l'homme. Très conservé au cours de l'évolution. Présent chez tous les mammifères et certains autres animaux. L'ARNm est exprimé principalement dans les neurones (résultats contradictoires mais localisation préférentielle probable dans les boutons présynaptiques), mais est retrouvé dans toutes les C du SNC et certaines C des organes périphériques. Les mécanismes de cette expression ne sont pas connus.

 

Constituée de 253 aa, poids moléculaire de 33-35 kDa. Domaine N-terminal pouvant chélater le cuivre, clivable par la protéinase K. Domaine C-terminal capable de s'ancrer à la face externe de la membrane cytoplasmique dans des zones riches en cholestérol. Taux élevé d'hélices alpha (43%) et faible de feuillets béta (3%). Structure tertiaire globulaire.

 

Maturation dans le réticulum et le Golgi → translocation → rejoint la face ext de la membrane cytoplasmique via les vésicules golgiennes → ½ vie de 3-6 h → dégradation par lysosomes.

 

Le rôle de la PrP n'est pas connu. Rôle dans la signalisation cellulaire ? Dans la neuroprotection ? Expériences d'invalidation sur souris → perturbations du rythme circadien et sensibilité accrue à l'épilepsie provoquée, pas d'autres aN.

 

Le rôle de la PrP de l'hôte au cours des EST a été démontré :

-        Susceptibilité individuelle : les souris dont le gène PRNP a été invalidé ne sont pas susceptibles aux ATNC. En outre, certains polymorphismes influent sur la susceptibilité individuelle et la durée d'incubation.

-        Niveau d'expression et durée de l'incubation : souris homozygotes PrP ont une durée d'incubation plus longue que les homozygotes. Souris transgéniques dont le niveau d'expression a été multiplié par 7 ont une durée d'incubation plus courte.

-        Barrière d'espèce : l'introduction au sein du génome murin d'une PrP de hamster permet l'infectiond des souris non seulement par des souches murines (par leur PrP native) mais aussi par des souches de hamster. L'introduction de PrP humaine ne donne les même résultats que si la PrP native est supprimée (présence de cofacteurs associés spécifiques d'espèce encore non déterminés ? – protéine X)

 

6.     LA PrPres ET LA NATURE DE L'ATNC

 

Les techniques conventionnelles de stérilisation ne diminuent pas l'infectiosité des échantillons à des normes compatibles avec la sécurité hospitalière. Ex : les ATNC sont 1000 x plus résistants aux radiations ionisantes que les plus résistants des agents microbiologiques connus.

 

Malgré des titres infectieux élevés, aucune structure compatible avec une particule virale ou un acide nucléique n'a pu être mise en évidence.

 

Des protocoles de purification de l'ATNC associant une protéolyse limitée, des étapes d'extraction par détergents, des centrifugations différentielles et des sédimentations sur gradient de sucrose → isolement d'une protéine hydrophobe de 27-30kDa, insoluble dans les détergents et partiellement résistante aux protéases → appelée PrPres (Protease resistant Protein, synthétisée), seul composant retrouvé de façon reproductible dans les fractions infectieuses, de façon proportionnelle à l'infectiosité (une unité infectieuse comprendrait de 10^4 à 10^5 PrPsc). La PrPsc apparaît en ME sous forme de structures fibrillaires (scrapie associated fibrills, retrouvée dans les lésions).

 

La PrPres et la PrP ont la même structure primaire. Leurs structures secondaires sont par contre très différentes : la PrPres contient 30% d'hélices alpha et 45% de feuillets beta. Aucune structure tertiaire de la PrPres n'a pu être obtenue (agrégabilité et insolubilité dans les détergents). Différentes théories existent quant à l'initiation du processus de conversion : formation d'une hélice beta, conformation en feuillets beta de la portion N-terminale normalement non structurée, repliement incorrect d'hélices alphaen feillets beta,…

 

Le lieu de synthèse de la PrPsc n'est pas connu. Lors d'une infection, 95% des PrP membranaires sont recyclées et 5% échappent à la dégradation et sont converties en PrPsc. Le lieu de la transconformation n'est pas connu. L'exposition à la surface membranaire semble essentielle : la déprivation en cholestérol ou l'insertion d'un ancrage transmembranaire artificiel inhibe la conversion. L'accumulation de PrPsc est post-transcriptionnelle : l'accumulation exponentielle ne s'accompagne pas d'une augmentation correspondante des ARNm.

 

7.     HYPOTHESE DU PRION

 

1967 :  1ère hypothèse de la nature exclusivement protéique des ATNC → 1982 : hypothèse d'un agent protéique dénué d'acide nucléique (prion = protéinaceaous infectious particule) qui serait la PrPsc qui serait capable de lier la PrP et de la transconformer en PrPsc. Trois modèles principaux de conversion :

-        Modèle de nucléation-polymérisation : transconformation réversible en PrPsc monomérique, moins stable que la PrP → aggrégation de PrPsc avec stabilisation → liaison à des PrP qui y seraient converties en PrPsc de façon irréversible vs des PrPsc qui y seraient stabilisées → dissociation de l'aggrégat en plusieurs fractions lorsqu'il atteint une masse critique

-        Modèle de polymérisation assisté par une amorce : la PrPsc serait plus stable que la PrP mais cinétiquement inaccesible. Il existerait un intermédiaire conformationnel thermodynamiquement équidistant entre PrPsc et PrP, PrP*. La transconformation de PrP en PrP* serait rendue possible par une protéine x catalysatrice. La PrP* serait convertie en PrPsc par une interaction entre PrP* et PrPsc.

-        Modèle d'auto-catalysation : la PrP formerait un hétérodimère avec une PrPsc exogène qui contiendrait les informations nécessaires de transconformation → formation d'un homodimère PrPsc-PrPsc → alimente le cycle + formation d'agrégats

 

Cette hypothèse devrait être confirmée par la production de PrPres à partir de PrP. La seule démonstration expérimentale jusqu'ici concerne que la conversion de la PrP en PrPres est PrPres dépendante.

 

Plaident contre cette hypothèse :

-        Développement d'EST sans PrPsc détectable (limite technique de détection ? intermédiaire de conformation sensible aux protéases ?)

-        Multiplicité des souches de prions identifiées.

-        Identification de tissus riches en PrPsc… sans infectiosité.

→ hypothèse d'un polymorphisme de PRNP qui influerait sur l'infectiosité / l'incubation / la clinique / …

 

NOTIONS D'ANATAMOPATHOLOGIE

 

Dès la neuro-invasion par les ATNC → accumulation de PrPsc, pathognomonique, avec lésions histopathologiques limitées au SNC et consistant en :

-        Spongiose = lésion la plus fréquente et la plus spécifique = formation de cavités (vacuolisation jusqu'à 50 um) dans le neuropile aux dépens des corps neuronaux et de leurs prolongements. Touche le cortex cérébral et cérébelleux et les noyaux gris centraux. Des lésions de spongioses focales peuvent être observées dans la démence à corps de Lewy, superficielles dans Alzheimer / Pick et, de façon générale lors de toute perte neuronale intense / œdème cérébral/ anoxie-ischémie.

-        Gliose astrocytaire accompagnée d'une activation microgliale → surexpression de la GFAP, ++ dans la SG ou à proximité des plaques amyloïdes.

-        Mort neuronale : constante mais d'intensité variable. Phénomène probablement apoptotique au vu de l'absence d'inflammation ou d'infiltration lymphocytaire.

-        Présence inconstante de plaques de dépôts extracellulaires amyloïdes (biréfringence après coloration au rouge Congo, insolubilité, aspect fibrillaire à la ME) : majoritairement constituées de PrPsc organisés en fibrilles. Aspect parfois typique de certaines EST. Présence également d'une accumulation d'héparanes sulfates, de protéoglycanes,… on y retrouve également des cellules microgliales.

 

L'hypothèse de la neurotoxicité de la PrPsc a été posée. Des expériences de greffe de tissus nerveux à des tissus dont le gène PrP avait été invalidé ont démontré que l'expression de la PrP est nécessaire à l'apparition des lésions (les neurones invalidés arrêtent de dégénérer alors que l'accumulation de PrPsc se poursuit via les celulles gliales environnantes). La PrPsc étant difficile à manier, de nombreuses expériences ont été menées sur base de peptides dérivés. Celui correspondant à la région 106-126 présente une activité neurotoxique (sur des cellules exprimant la PrP, pas sur les neurones invalidés) pro-apoptotique avec mise en évidence de la fragmentation de l'ADN. Ce peptide est, tout comme la PrPres, peu hydrosoluble et s'agrège en fibriles présentant une biréfringence verte en lumière polarisée (indiquant une conformation en feuillet B caractéristique des structures amyloïdes).

 

Les mécanismes de cette activité pro-apoptotique restent inconnus. Evocation d'une implication des récepteurs NMDA, de production de radicaux libres par les cellules microgliales, altération de l'activité des cancaux Ca V-dépendants, activation de la voie des MAP kinases, effet déstabilisateur de membrane,… D'autres résultats suggèrent une perte de fonction neuro-protectrice de la PrP (propriétés de liaison au Cu de la PrP qui est exposée dans la fente synaptique avec un cycle d'endocytose rapide → fonction d'internalisation du Cu, dont le métabolisme est lié au stress oxydatif… hypothèse également soutenue par le fait que les neurones invalidés sont plus sensibles aux agressions).

 

D'autres théories existent, expliquant l'absence de détection de PrPsc dans certaines EST malgré la présence de lésions caractéristiques :

-        Toxicité d'un intermédiaire de conformation pathologique sensible aux protéases

-        Toxicité d'une surproduction de formes topologiques transmembranaires habituellement minoritaires (la PrP est habituellement ancrée à la surface membranaire).

 

MALADIE DE CREUTZFELDT-JAKOB SPORADIQUE (> 80% des EST)

 

80% des EST. 1-1,5 cas/ million d'hab/ an sans prépondérance géo. Etiologie inconnue. Age moyen de survenue ≈ 65 ans. Mortalité 100% avec durée de survie moyenne ≈ 6,5 mois.

 

1.     CLINIQUE

 

-        Eventuelle phase prodromique non spécifique : asthénie, anxiété, troubles du sommeil, anorexie, dépression, confusion

-        Installation progressive (rarement brutale, "pseudo-vasculaire") de signes neuros :

o   Troubles cognitifs évoluant vers une démence = signe cardinal : ++ mémoire, orientation spatio-temporelle, langage, praxie, reconnaissance

o   Myoclonies = très fréquentes : spontanées ou provoquées, svt diffuses

o   Syndrome cérébelleux : ataxie, dysarthrie, nystagmus

o   Troubles visuels polymorphes : "gêne", hémianopsie, diplopie, couleurs, hallus, agnosie visuelle, cécité corticale

o   Syndrome pyramidal : complet ou simple hyperréflexie

o   Signes extrapyramidaux : rigidité, dystonie, tremblements, chorée-athétose, ballisme

o   Rarement : POM, troubles sensitifs, atteinte de la corne ant de la moelle, crises E/ états de mal

 

Début généralement subaigu → accélération → évolution classique vers mutisme akinétique.

 

Différentes formes cliniques ont été décrites :

-        Forme pariéto-occipitale = amaurotique de Heidenhain → prédominance de signes visuels

-        Forme cérébelleuse de Brownell et Oppenheimer → dominée par une ataxie

-        Forme thalamique de Garcin → dominée par la démence et les mvts aN

-        Forme amyotrophique → atteinte prédominante de la corne ant de la moelle et Sd pyramidal

-        De rares cas, confirmés à l'anapath, ont été décrit en l'absence de troubles démentiels → révélation par des états de mal E/ des signes neuros focaux d'évolution rapide

 

De façon générale, le diag est à évoquer devant des troubles intellectuels d'aggravation rapide accompagnés d'un signe neuro tel que myoclonies/ Sd cérébelleux/ tr visuels…

 

2.     EXAMENS COMPLEMENTAIRES

 

a)      CT-scan cérébral

 

→ non contributif. Eventuelle atrophie variable.

 

b)     IRM cérébrale

 

L'IRM peut être N (33%, fréquemment N en début d'évolution). Cependant, sont contributifs : hypersignaux des rubans corticaux/ sous-corticaux/ striatum, ++ bilat. ++ en diffusion > FLAIR > T2.

 

c)      PET-scan et SPECT cérébraux

 

Non validés. Une revue de 2002 décrit les aN fréquemment retrouvées au PET-scan : hypométabolisme étendu, asymétrique dans 2/3 des cas, dont le pattern diffère généralement des autres maladies dégénératives (tous les patients étudiés ont un hypométabolisme d'au moins une région temporale/ pariétale, fréquent au niveau cérébelleux/ occicipital/ noyaux de la base) + pas de preuve, mais suggestion d'une corrélation entre myoclonies et hypométabolisme pariétal/ temporal controlat. Démonstration d'une meilleure Se du PET-scan que de l'IRM. Sp reste en débat. Une étude de 2011 rappelle que les foyers hypométaboliques sont fréquents en cas de myoclonies et démontre que des foyers hypermétaboliques sont corrélés à des crises E.

 

Des cas d'hypodébit thalamique bilat au SPECT ont été rapportés. De façon générale, une hypoperfusion est retrouvée aux zones hypométaboliques au PET.

 

d)     EEG

 

On observe un ralentissement du rythme de base +- décharges d'ondes lentes delta. Dans 60% : complexes (pseudo)-périodiques (≈ 1cycle/ sec) - ! des complexes pseudo-périodiques peuvent aussi s'observer dans d'autres maladies telles qu'Alzheimer ou la démence à corps de Lewy ! des complexes périodiques peuvent s'observer au cours d'encéphalopathies iatrogènes (valproate !)/ métaboliques (Al chez les dialysés !)/ infectieuses (encéphalite herpétique !) ! aN svt transitoires → répéter les EEG.

 

e)      Examens biologiques

 

-        Biol usuelle : strictement N

-        LCR : examens usuels généralement N, possible hyperprotéinorachie (ordinairement < 1g/l), < 10 C/mm3

o   PR 14-3-3 → Se ≈ Sp ≈ 90%

§  ! Marqueur de souffrance neuronale, parfois positif également dans : AVC, encéphalopathie métabolique/ toxique/ infectieuse, syndromes paranéo, état de mal, démences ! Se retrouve particulièrement dans les EST… Pq ???

 

f)       Etude génétique

 

L'étude du gène PRNP systématique permet d'éliminer une forme génétique. Possible identification d'un facteur de susceptibilité au codon 129 (80% d'homozygotes méthionine-méthionine ++/ valine-valine vs 50% dans la population générale).

 

g)     Autopsie : examen anapath et biochimie

 

→ un résultat positif affirme le diag de certitude. Spongiose + raréfaction neuronale + gliose astrocytaire +- plaques amyloïdes de PrPsc. Détection de PrPsc par Western-Blot. Mais un résultat négatif n'élimine pas le diag.

 

EST GENETIQUES

 

1.     MCJ GENETIQUES (5-15% des EST)

 

Dues à des mutations / insertions du gène PRNP (mutations sur les codons 178 et 200 >>> 180, 210 et 232, insertions entre les codons 51 et 91). La notion d'antécédent familial se retrouve dans < 50% des cas → tjrs effectuer une analyse PRNP en cas d'EST !

 

La clinique varie selon l'aN génétique :

-        Mutation 200 → tableau comparable à la MCJ sporadique, âge de début semble plus précoce (50-60 ans). EEG périodique et PR 14-3-3 + fréquents.

-        Mutation 178 → tableau de MCJ sporadique sauf : âge de survenue (≈ 46 ans), durée d'évolution (≈ 20 mois), absence habituelle d'EEG typique.

-        Mutations 180, 210 et 232 → découvertes fortuites lors de tableaux de MCJ sporadiques

-        Insertions → chaque insertion n'est présente que dans un nombre limité de famille → description clinique malaisée. Trait commun : apparition précoce et évolution très lente (qq années).

 

2.     SGSS : SYNDROME DE GERSTMANN-STRAUSSLER-SCHEINKER

 

Forme familiale particulière caractérisée par des plaques de PrPsc multicentriques, liée à des mutations PRNP (++ codon 102 >>> 105, 117, 145, 198, 217). Certaines insertions ont été décrites. Absence habituelle d'EEG périodique ou de PR 14-3-3.

 

La clinique varie selon l'aN génétique :

-        Mutation 102 → début vers 40 ans, Sd cérébelleux inaugural → troubles oculomoteurs, signes pyramidaux, troubles cognitifs. Rares myoclonies. 1-11 ans d'évolution.

-        Mutation 117 → symptomatologie très variable, s'enrichissant parfois au cours des générations

-        Mutations 198 et 217 → caractérisée par des plaques amyloïdes multicentriques avec dégénérescences neurofibrillaires identiques à Alzheimer

-        Mutation 145 → clinique proche d'Alzheimer avec évolution pouvant atteindre 21 ans. Pas de preuve d'un caractère familial ou transmissible.

-        Mutation 105 → isolée au Japon. Clinique dominée par une paraparésie spastique et labilité émotionnelle. Démence tardive au 2ème plan.

 

3.     INSOMNIE FATALE FAMILIALE

 

Due à une mutation ponctuelle du codon 178 (idem qu'une des MCJ génétiques) associée à un codon 129 sur le même allèle codant une méthionine.

 

Age moyen de début ≈ 50 ans. Clinique caractéristique : insomnie rebelle avec rêves et hallus + troubles végétatifs (disparition des rythmes circadiens, hyperactivité sympathique, troubles sphinctériens) + troubles moteurs + démence pouvant survenir tardivement. Myoclonies rares. Les homozygotes MM ont une durée d'évolution courte (++ < 1 an) et marquée par les troubles du sommeil et végétatifs. Les hétérozygotes ont une évolution > 1 an et plus svt des signes neuros précoces. L'EEG de sommeil montre une diminution puis disparition de l'actuvuté delta, des fuseaux de sommeil et complexes K + phases aN de sommeil paradoxal. Absence habituelle d'EEG périodique ou de PR 14-3-3.

 

L'anapath est typique : atteinte prédominante des noyaux dorsomédian et ant du thalamaus, peu de spongiose, pas de plaque amyloïde.

 

EST ACQUISES – MALADIE DE CREUTZFELDT-JAKOB VARIANTE (vMCJ)

 

Hypothèse étiologique : consommation de dérivés bovins contaminés. Moyenne d'âge ≈ 30 ans. Mortalité 100% avec durée de vie moyenne ≈ 18 mois.

 

1.     CLINIQUE

 

-        Troubles psychiatriques/ comportementaux → quasi-constants, ++ inauguraux

o   Troubles anxieux/ dépressifs/ états délirants

-        Douleurs/ dysesthésies de topographie variable

-        Signes neurologiques tardifs (++ qq mois après les symptômes précédants)

o   ++ syndrome cérébelleux et syndrome pyramidal > tardivement : syndrome extrapyramidal, mvts involontaires, myoclonies généralement discrètes/ absentes, aN oculomotrices, dégradation cognitive → évolution vers mutisme akinétique

2.     EXAMENS COMPLEMENTAIRES

 

a)      IRM cérébrale

 

→ aN évocatrices : hypersignaux thalamiques (pulvinar +- noyau dorso-médian) +- striataux (moins marqués !) en T2/ FLAIR/ diffusion.

 

b)     EEG

 

Encéphalopathie diffuse. Exceptionnelle observation d'aN périodiques.

 

c)      Examens biologiques

 

-        LCR : idem MCJ sauf : Se de la PR 14-3-3 ≈ 50%

 

d)     Etude génétique

 

Elimination d'une EST génétique. Tous les patients décrits sont homozygotes MM au codon 129.

 

e)      Biopsie d'amygdale pharyngée

 

Permet le diag positif en cas de mise en évidence par Western-Blot de PrPsc type 2B (tropisme de l'agent bovin pour les organes lymphoïdes).

 

f)       Autopsie

 

→ caractéristique = abondance de plaques amyloïdes de type kuru dans l'isocortex, noyaux gris centraux et cervelet dont certaines sont entourées d'une couronne de vacuoles (aspect en marguerite), associées à des dépôts synaptiques, granulaires, focaux et péricellulaires. Lésions de spongiose et gliose diffuses prédominant dans le cortex occipital, striatum et thalamus. Démonstration biochimique de PrPsc type 2B

 

EST ACQUISES – MALADIES DE CREUTZFELDT JAKOB IATROGENES

 

= MCJ résultant d'une inoculation de l'agent pathogène.

 

L'inoculation (de proximité) cérébrale entraîne un tableau clinique similaire à celui d'une EST sporadique. L'ataxie cérébelleuse semble cependant plus svt inaugurale. Les cas rapportés concernent des greffes de cornée / dure-mère, l'utilisation d'électrodes intracérébrales ou d'autres instruments neurochir. Des incubations de > 10 ans ont été rapportées.

 

L'inoculation périphérique entraîne un tableau clinique stéréotypé, initialement différent des EST sporadiques et rappelant le kuru : début marqué par une ataxie cérébelleuse, des troubles oculomoteurs et un nystagmus → apparition rapide de troubles du comportement (euphorie, indifférence), tremblement irrégulier, céphalées, polyphagie, troubles du sommeil → apparition inconstante après qq mois d'une démence, de signes pyramidaux et de myoclonies +- troubles sensitifs et visuels → évolution vers un mutisme akinétique. Durée d'évolution moyenne ≈ 18 mois. L'EEG est rarement périodique, la PR 14-3-3 se positivise svt après 3-6 mois d'évolution. L'électrorétinogramme est svt précocément altéré. Les cas rapportés concernent des traitement par hormone de croissance humaine (SC / IM). Le polymorphisme du codon 129 du gène PRNP semble influencer le risque de contamination et la durée d'incubation.

 

 

 

EST ACQUISES – KURU

 

Historique. Région Foré en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Lié à des repas cannibales rituels. Nette prépondérance des cas chez les femmes et enfants qui consommaient les viscères et le cerveau alors que les hommes consommaient les muscles. Plus aucun cas répertorié chez les sujets nés après 1956 (interdiction du cannibalisme) mais encore un cas décrit en 2003 chez un sujet ayant participé à l'époque à un repas contaminant.

 

Déclaration entre 4 et 60 ans → phase "ambulante" : ataxie cérébelleuse, tremblement, troubles oculomoteurs → phase "sédentaire" : rigidité, myoclonies, syndrome pseudo-bulbaire → phase "terminale" suivie d'un décès dans les 3-9 mois. Aucune aN biol. EEG montrent tardivement un tracé diffusément ralenti et désorganisé. L'anapath montre une atrophie vermienne, une prolifération astrogliale et raréfaction neuronale, une spongiose et, dans ¾ des cas, des plaques.

 

ELEMENTS DE PRISE EN CHARGE ET SECURITE SANITAIRE

 

1.     SURVEILLANCE EPIDEMIOLOGIQUE

 

Organisée à l'échelon international par l'OMS. Il existe également des réseaux régionaux (ex : NeuroCJD pour l'UE). Nombre d'Etats ont également mis en place un centre de surveillance national.

 

2.     MESURES DE SECURITE – PREVENTION D'UNE CONTAMINATION SECONDAIRE

 

Le risque de transmission est peu connu (l'agent n'étant même pas certain !). L'OMS (2006) a définit 3 catégories de risques :

 

A

TISSUS A HAUT RISQUE INFECTIEUX

Cerveau, moelle épinière, rétine, nerf optique, ganglions spinaux/ du V, hypophyse, dure-mère

B

TISSUS A FAIBLE RISQUE INFECTIEUX

Sang, SNP, tissu lymphoïde, TD, poumon, foie, rein, surrénale, pancréas, moelle osseuse, muscles squelettiques, langue, vaisseaux sanguins, muqueuse nasale, glandes salivaires, cornée, placenta

C

TISSUS A CARACTERE INFECTIEUX INDETECTABLE

Système reproducteur, os, péricarde, tendons, gencives, pulpe dentaire, trachée, peau, tissu adipeux, thyroïde, glande mammaire, lait et colostrum, sang du cordon, salive, sueur, larmes, mucus nasal, bile, urine, fèces

 

Jusqu'ici, tous les cas rapportés concernent des tissus A + le sang (B). Cependant, la détection de PrPsc dans les amygdales suggère de considérer différement le risque pour les vMCJ.

 

La voie intracérébrale semble la plus à risque. Le risque varie également selon l'espèce d'origine et la souche de l'agent.

 

→ Différentes mesures ont été prises/ sont recommandées :

-        Interdiction des allo-greffes de dure-mère, sélection des donneurs de cornée, remplacement de la GH humaine par une hormone synthétique.

-        Les mesures intra-hospitalières à prendre dépendent de chaque établissement → prévenir le service d'hygiène dès suspicion. Privilégier cependant le matériel à usage unique/ sa destruction (systématique pour les procédures invasives !)

-        Accident du travail → à déclarer immédiatement, laver avec eau de javel diluée au demi (sauf muqueuses → prolonger rinçage au sérum phy) puis rinçage abondant.

 

3.     PRISE EN CHARGE DES PATIENTS

 

Prise en charge purement symptomatique et compassionnelle. Aucun tt curatif validé.

 

Perspectives thérapeutiques :

-        Ont retardé l'apparition des signes sur animaux de labo mais pas d'action sur la phase clinique : polyanions, rouge Congo, amphotéricine B, anthracyclines, dapsone.

-        La mépacrine est autorisée en France depuis 2001 à titre "compassionel". Pas d'effet démontré.

-        Efficacité relative du pentosane polysulfate intraventriculaire rapportée dans un modèle murin expérimental → usage "compassionel" autorisé en UK et essai ouvert en France.

-        Etude européenne en double aveugle vs placebo en cours concernant les tétracyclines (résultats significatifs sur les propriétés de la PrPsc et la période d'incubation dans une étude italienne par rapport à une cohorte historique).

 

4.     QUOD PAR RAPPORT A LA PRISE EN CHARGE DIAGNOSTIQUE ?

 

-        ! DIAG D'EXCLUSION !

o   L'IRM tend à devenir un argument déterminant, mais aN discrète et toujours ! PAS DE DIAG POSITIF !

-        Etude de 2011 sur > 1000 diags → 50% de diags invalidés à l'autopsies ! 25% étaient potentiellement curables !

-        Critères diags conçus pour l'épidémio et non la clinique !

 

Face à une clinique évocatrice d'évolution rapide : recherche systématique et étendue d'étiologies curables, même improbables ! ESSAIS THERAPEUTIQUES AU MOINDRE DOUTE !