Eléments de médecine du travail

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La médecine du travail consiste en la surveillance de la santé des travailleurs (promotion et maintien de la santé) : travail adapté à chacun, dépistage des maladies professionnelles, renseignements et conseils, éviter l’occupation des travailleurs à des tâches constituant un facteur de risque, éviter la présence de personnes susceptibles de contaminer les autres travailleurs par des maladies transmissibles,… et relativiser tout ça… Cet article n'a pour seul objet que de décrire de façon concise le cadre belge de cet exercice.

Décision d'aptitude

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La décision du médecin du travail se prend sur base de :

  • Son examen médical
  • Les examens jugés nécessaires (à charge de l’employeur)
  • Les conditions socio-professionnelles du patient
  • La connaissance de la fonction, de ses dangers (potentiel de nuisance propre au matériel), de ses risques (probabilité que le danger puisse causer un dommage) et des facteurs de risque (qui accroissent le risque)
  • La  connaissance des possibilités d’aménagement de travail pour maintenir la santé du travailleur et autres possibilités de contrôle du risque

Elle se solde par la délivrance d’une « fiche d’aptitude » déclarant l’aptitude, l’aptitude restrictive (aménagement de poste) ou l’inaptitude (temporaire ou définitive/ totale ou partielle).

En cas de contestation de la décision du médecin du travail, le travailleur peut introduire une demande en concertation (avec son médecin traitant) ou un recours (inspection médicale du travail), sauf en cas d’embauche. Un recours ne peut être introduit si la décision consiste en une déclaration d’aptitude sans restriction.

L’employeur ne peut introduire de recours.

Les travailleurs ou postes considérés comme à risque : les < 21 ans, postes de sécurité (machines dangereuses, conducteurs d’engins, grues, port d’arme,…), postes de vigilance (installation pouvant présenter un danger en cas de baisse de vigilance), exposition à des agents nocifs (chimiques, mécaniques [lourdes charges], biologiques, rayonnements,…), manipulation de denrées alimentaires.

Les procédures d'appel

Procédures suspensives exceptés pour les « situations d’urgence » (sécurité, vigilance, agents nocifs, femmes enceintes, atteinte d’une maladie contagieuse). Ces procédures ne concernent pas les cas d’embauche (si la décision est prise dans les 14 jours suivant la mise au travail).

Procédure de concertation

  • Obligatoire si le travailleur la demande dans les 5 jours suivant la notification de la décision.
  • Ne concerne pas les situations d’embauche
  • Réexamen du cas par le médecin traitant du travailleur ou tout autre médecin choisi par ce dernier
  • Décision prise par le médecin du travail dans un délai de 14 jours en connaissance de l'avis du médecin traitant

La procédure combine les connaissances du médecin traitant (son patient) et du médecin du travail (risques professionnels).

En cas de désaccord entre l'avis du médecin traitant et la décision du médecin du travail, celui-ci est acté sur la nouvelle fiche d’aptitude.

Procédure de recours

Utilisable par  le travailleur en cas d’échec de la procédure de concertation

  • Adressée à l’inspection médicale du travail dans les 7 jours ouvrables suivant la notification de la décision.
  • En cas de recours non suspensif, l’employeur doit réaffecter le travailleur à un autre poste, ne présentant pas de danger, sur avis du médecin du travail pour la durée de la procédure
  • Rediscussion du cas par un Conseil Médical (médecin du travail, médecin traitant et médecin inspecteur du travail)
  • Prise de la décision à la majorité dans un délai de 21 jours, faisant l'objet d'un procès-verbal actant la décision
  • Si une décision ne peut être dégagée, elle revient au seul médecin inspecteur.

Protection de la travailleuse enceinte

Protection de la travailleuse enceinte

Régie par la loi de 1995 protégeant la travailleuse enceinte contre les nuisances du milieu.

Etapes réglementaires

  • Etude préalable des activités à risque dans l’entreprise par l’employeur -> établissement d’une liste et prévoir le devenir des travailleuses dans ce cas
  • La femme doit avertir le MW sans délai -> examen -> rendu de la décision : (idem  si allaitante)
    • Apte
      • A poursuivre
      • Moyennant aménagement
      • Moyennant mutation
    • Inapte
      • A continuer
      • A occuper la nouvelle activité proposée
    • Propose mise en congé maladie
  • Possibilité de recours et concertation non suspensifs (cf supra).

Droits de la travailleuse enceinte 

  • Peut s’absenter pour examens prénataux ne pouvant avoir lieu hors des heures de travail, sur certificat médical et en prévenant l’employeur
  • Droit de ne plus travailler la nuit
  • Congé de maternité périnatal : 15 semaines (indemnisation par la mutuelle à 85% du salaire)
  • Congé parental : 3 mois temps plein ou 6 mois mi-temps
  • Si allaitement -> droit à 30 minutes toutes les 4 heures pour tirer son lait

Devenir de la travailleuse

  • Continue de travailler jusqu’à une semaine avant accouchement. Droit de reporter les 14 semaines péri-partales en post-partum
  • Ecartée pour raisons lié à des risques professionnels -> indemnisation par le fonds des maladies professionnels (90% du salaire)
  • Ecartée pour autre raison médicale -> indemnisation par mutuelle (60%)

En cas d’écartement : 7 semaines d’office dans le cadre du congé périnatal (indemnisation par la mutuelle à 85%)

En cas d’écartement pour un risque sur l’allaitement en post-partum -> indemnisation par la mutuelle (60%) après le congé périnatal officiel, pour une durée jusqu’à 5 mois.

Le congé périnatal est de règle : 7 semaines prénatales + 9 post-natales

Les maladies professionnelles

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Il n’existe pas de maladie purement professionnelle mais on peut définir un risque d’exposition à des influences nocives accru par rapport à la population générale.

La demande en réparation (victime/ médecin traitant / mutuelle) et la déclaration de maladie professionnelle (médecin du travail) sont deux choses distinctes (bien que cette dernière ait valeur de demande en réparation conservatoire pendant 60 jours en faveur de la victime).

Une demande en réparation se fait habituellement par la victime (+- aidée par son médecin traitant), parfois par la mutuelle, des ayant-droits, des hôpitaux,…

La déclaration de maladie professionnelle ne peut se faire que par le médecin du travail auprès du fonds des maladies professionnelles (FMP). Elle est également importante d’un point de vue statistique et politique de prévention. En outre, elle permet la cessation de l’exposition au risque, par écartement/ aménagement des conditions/ reclassement du travailleur.

Les maladies professionnelles les plus fréquentes : Tuberculose > "paralysies" > problèmes dermatologiques (en hausse) > mono/polyneuropathies (en baisse). L’HBV a quitté le top 10 du fait des vaccinations. Mais apparition des zoonoses [éboueurs, éleveurs, vétérinaires,…] (du fait d’une attention accrue). 

Secteurs les plus touchés en nombre absolu : soins de santé (en hausse), construction (en baisse), horeca (en hausse), manutention (en hausse), métallurgie (demeure en 1ère place en terme relatif par rapport au nombre de travailleurs),…

Types réglementaires de maladies professionnelles

Systèmes de liste professionnelle

Règle de l’imputation à la profession : il n’y a pas d’autre maladie professionnelle que celles existant dans la liste (fixée par arrêté royal - A.R.), sauf application du système ouvert.

Présomption d’exposition 

En faveur de la victime qui ne doit pas apporter la preuve que sa maladie soit d’origine professionnelle -> métiers où certaines maladies sont présumées professionnelles. Cette présomption ne peut être retournée (irréfragable).

Systèmes hors présomption

Nécessité de fournir de 3 éléments par la victime :

  • Souffre d’une maladie professionnelle (présente sur la liste)
  • Preuve de l’exposition au risque antérieure à la  maladie
  • Existence d’un lien de causalité entre le risque et la maladie (lien non nécessairement direct ou déterminant car les maladies sont généralement multicausales)

Systèmes hors liste = systèmes ouverts

La maladie ne figure pas sur la liste des maladies professionnelles mais la victime estime qu’il existe un lien -> doit cette fois demander réparation en prouvant maladie + exposition à un risque + lien direct et déterminant de causalité… ce qui est très difficile (ex : arthrose lombaire,…)

Rôles de la mutuelle

Si le travailleur n’est plus en activité, la demande en réparation est introduite directement, par le patient ou par la mutuelle (désireuse de ne pas payer à la place du FMP).

Types de réparation et de prévention

La réparation

Réalisée par le FMP (parastatal unique assureur en la matière), concerne : soins de santé non pris en charge par l’INAMI, prothèses et orthèses, décès de la victime, incapacités temporaires ou permanentes totales ou partielles de > 15 jours

La prévention

  • Le FMP prend en charge les coûts de certaines campagnes de prévention (ex : vaccination HBV)
  • Ecartement des travailleuses enceintes
  • Ecartement temporaires ou définitifs en cas de menace de maladie professionnelle
  • Actions propres au secteur privé…

Rôles du médecin du travail

Prévention et dépistage 

La prévention est son rôle premier. La survenue d’une maladie professionnelle est un échec. Dans ce cas, il doit tout faire pour les dépister précocement.

Déclaration de maladie professionnelle

Ce n’est pas une demande en réparation, qui ne peut-être faite que par la victime, la mutuelle, le médecin traitant, les ayants droits,... !!!! Ce sont deux choses indépendantes !

C’est une déclaration de la maladie professionnelle par le médecin du travail au médecin conseil du FMP et au médecin-inspecteur du travail.

Mécanismes de la réparation

  • Introduction d’une demande en réparation par la victime/ mutuelle/ MT auprès du FMP
    • Comprend données signalétiques, dossier médical, employeurs successifs,…
  • Si des éléments sont manquants -> demande en réparation conservatoire = demande non examinée le temps que la victime complète le dossier
  • A la différence d’un accident du travail, la date de consolidation n’est pas définitive (les maladies n’ayant pas une évolution standardisée et variant au cours du temps, leurs séquelles ne sont pas consolidables).
  • Rendu de la décision
  • Révisions si nécessaires (puisque le plus souvent considérée comme non consolidée)

Procédures en reconnaissance de maladies professionnelles

Devenir de la victime

  • Reclassement du travailleur sans perte de salaire, dans un autre emploi ou dans son emploi après en avoir éliminé les éléments nocifs
  • En cas de non reclassement (perte d’activité) ou de reclassement avec perte de salaire : le FMP compense la perte de salaire
    • Indemnisation en cas de cessation temporaire
    • En cas de cessation définitive : pdt 90j la victime reçoit des indemnités temporaires puis des indemnités liées aux séquelles définitives. Le FMP finance alors une réadaptation professionnelle de la victime qui reçoit des indemnités d’incapacité temporaires totales pendant sa formation.
  • Si la victime refuse les reclassements possibles ou cessation de travail -> perd tous ses droits au FMP

Différences entre maladies professionnelles et accidents du travail

Contrairement aux accidents du travail, dans les maladies professionnelles :

  • Si liste + système de présomption -> ne doit pas apporter la preuve (dans un accident du travail : présomption qui peut être retournée)
  • Pas de point de départ fixe ni d’évolution univoque (-> difficulté d’établir une date de consolidation)

Auteur(s)

Shanan Khairi, MD