Diarrhée chronique
= émission de selles > 3x/j ou > 300g durant > 3 sem. Résulte de la malabsorption ou de la sécrétion anormale d'un soluté/ électrolyte/ nutriment.
La première chose à faire sera d'éliminer l'incontinence anale et les fausses diarrhées (hypersécrétion réactionnelle à la stase fécale/ à l'abus de laxatifs irritants/…) alternant svt avec des épisodes de constipation. A cette fin, on procédera durant 3j à une mesure du poids des selles et à leur examen coprologique fonctionnel.
Physiopathogénies et première orientation clinique
TYPE |
MECANISME |
CAUSES PRINCIPALES (fréquence) |
Motrice |
Transit accéléré (diminution du temps de contact entre muqueuse et solutés) |
Colopathie fonctionnelle (+++) Hyperthyroïdie (+) |
Sécrétoire |
Sécrétion d'ions |
Colite microscopique (++) Tumeur endocrine (-) |
Osmotique |
Hyperosmolarité luminale |
Déficit en lactase (++) Laxatifs (+) |
Lésionnelle |
Fuite de plasma |
Colite inflammatoire (++) Tumeur (+) Tuberculose intestinale Colite ischémique/ post-ABth |
Malabsorption |
Entérocytopathie/ fuite de lymphe/ maldigestion |
Maladie cœliaque (++) Insuffisance pancréatique (+) Colonisation bactérienne grêle chronique (+) Lymphangiectasies intestinales (-) Colites inflammatoires Lymphomes Causes de cholestase |
On pourra habituellement s'orienter rapidement vers un de ces tableaux cliniques :
Diarrhées lésionnelles
Eléments d'orientation : rectorragies, glaires, pus, DEG,… Le diag repose généralement sur un syndrome inflammatoire biologique et une iléocoloscopie avec biopsies.
Diarrhées par malabsorption et/ ou entéropathies exsudatives
Eléments d'orientation : syndrome de malabsorption (amaigrissement avec conservation de l'appétit, pâleur, OMI, d+ osseuses, pigmentation cutanée, glossite, ecchymoses, troubles neuros, anémie hypochrome, hypoalbuminémie, stéatorrhée [> 5g de lipides/ 24h], créatorrhée, hypoCa, hypocalciurie, augmentation des PAL, baisse du taux de prothrombine). La distinction entre malabsorption proprement dite (patho intestinale) et maldigestion (patho pancréato-biliaire) nécessitera généralement une biol, un CT abdo +- transit grêle +- vidéo-entéroscopie (Crohn, lymphome, pancréatopathie, cause de cholestase prolongée), une OGD avec biopsies (maladie cœliaque, lambliase, lymphome).
Les entéropathies exsudatives entraînent une fuite protéique luminale se traduisant par une hypoalbuminémie majeure et une hypoCa. Lorsqu'elle est en rapport avec une fuite lymphatique, elle se traduit en sus par une lymphopénie et une stéatorrhée. La confirmation repose sur la mesure de la clairance fécale de l'α-1-antitrypsine sur les selles de 3j.
Diarrhées hydro-électriques
Eléments d'orientation : selles aqueuses, pas de glaires/ sang. Pas de signes de malabsorption. Courbe ponndérale suivant l'évolution de la diarrhée. Il en existe trois grands types svt intriqués :
Diarrhées motrices
Eléments d'orientation : selles impérieuses dans l'heure après les repas et contenant des aliments non digérés +- d+ abdos, pas de selles nocturnes, amélioration sous lopéramide/ jeûne. Rechercher la notion d'une vagotomie, d'une hyperthyroïdie, d'un diabète. La recherche d'une tumeur carcinoïde ou d'une neuropathie viscérale se fera selon le contexte. L'étiologie la plus fréquente, les colopathies fonctionnelles, est un diag d'exclusion.
Diarrhées sécrétoires
Eléments d'orientation : abondantes, persistance à jeun, pas d'horaire particulier. On recherchera une prise médicamenteuse susceptible d'entraîner une colite microscopique (veinotonniques, ,…), une cryptosoridiose (++ immunodéprimés) et une tumeur endocrine.
Le risque de déshydratation est important et peut imposer une hospit.
Diarrhées osmotiques
Dues à l'ingestion d'un soluté peu absorbable, elles s'interrompent à jeun, sont moyennement abondantes et plutôt diurnes. On recherchera particulièrement une intolérance au lactose et la prise de laxatifs osmotiques (attentions aux consommations non avouées → recherche dans les selles et urines).
Attitude diagnostique
- Interrogatoire et examen clinique → orientation diag
- Quasi toujours nécessaire : bilan endoscopique complet avec biopsies duodénales, iléales et coliques
- En cas d'absence de diag → CT + écho abdo, biol (hémato, CRP, VS, TP, iono, glycémie, électrophorèse des protéines, cholestérol, tests de la maladie cœliaque) + coproparasitologie des selles
- En cas d'absence de diag : investigations en centre spécialisé : test fonctionnels et explorations hormonales
- En cas d'absence de diag → CT + écho abdo, biol (hémato, CRP, VS, TP, iono, glycémie, électrophorèse des protéines, cholestérol, tests de la maladie cœliaque) + coproparasitologie des selles
Anamnèse
- Date de début et circonstances (changement des habitudes alimentaires, voyage, stress, nouveau médoc)
- Traitement à domicile et atcdts persos (++ chir/ RXth digestive, diabète, infections répétées suggérant une agammaglobulinémie) et familiaux (pancréatites, NEM, colites inflammatoires), comportement sexuel
- Abondance : pesée des selles sur 3j par le patient
- Fréquence et rythme, caractère nocturne réveillant le patient (++ origine organique)
- Influence de l'alimentation : lait/ autres déclenchant/ aggravant, amélioration par le jeune (++ osmotique)
- Aspect des selles et signes associés (interrogatoire + examen du bocal des selles) :
- Volumineuses, décolorées, non sanglantes, graisseuses + d+ périombilicales + ballonement → maldigestion/ malabsorption ?
- Fréquentes, peu abondantes, présence de mucus et sang + épreintes + faux besoins → tumeur ou colite inflammatoire ?
- Très liquides, aqueuses, pas de graisse/ sang, présence d'aliments peu digérés → diarrhée motrice ?
- Liquides avec parcelles dures → fausse diarrhée de la constipation traitée par laxatifs irritants ?
- Caractériser les éventuelles d+ associées :
- Syndrome de Koenig (d+ intenses paroxystiques fixes avec météorisme localisé, durant qq h suivies par des selles liquides) → lésion sténosante ?
- D+ post-prandiales péri-ombilicales très intenses (parfois calmées par les dérivés nitrés/ anticalciques) → ischémie grêle ?
- D+ épigastriques ulcéreuses → syndrome de Zollinger-Ellison ?
Examen clinique
Complet, attention particulière à l'abdomen + proctologique, aux souffles artériels, au cœur, aux aires ganglionnaires, aux téguments/ muqueuses/ articulations, à la thyroïde.
SIGNES ET SYMPTOMES EVOCATEURS | |
Arthralgies/ arthrite |
Crohn, RCUH, Whipple |
Athéromatose diffuse |
Ischémie intestinale |
Dermatite herpétiforme |
Atrophie villositaire |
Érythème noueux, uvéite |
Crohn, RCUH |
Fistules, fissures anales |
Crohn |
Flushs (accès d'érythème facial) |
Tumeur carcinoïde |
ADP périphériques |
Lymphome, Whipple, SIDA |
Glossite, aphtes |
Maladie cœliaque, Crohn, RCUH |
Hippocratisme digital |
Maladie cœliaque, Crohn |
Hyperpigmentation |
Maladie cœliaque, Whipple |
Hyperthyroïdie |
Diarrhée motrice |
HypoTA orthostatique |
Diabète, amylose, syndrome de Shy-Drager |
Infections à répétition |
Déficit en Ig |
Insuffisance cardiaque D |
Tumeur carcinoïde |
Neuropathie périphérique |
Diabète, amylose |
Tumeur thyroïdienne |
Diarrhée motrice |
Péricardite constrictive |
Lymphangiectasie du grêle |
UGD |
Syndrome de Zollinger-Ellison |
Examens complémentaires
- Examen coproparasitologique
- Examen fonctionnel et quantitatif
- Examen parasitologique
- Recherche de laxatifs et mesure de la clearance de l'α-1-antitrypsine + créatorrhée + acides organiques et ammoniaque
- Une coproculture en 1ère intention n'est pas indiquée
- Endoscopie + biopsies
- En 1ère intention : coloscopie et gastroscopie. Iléoscopie en 2de intention.
- Biologie + EMU
SIGNES BIOLOGIQUES EVOCATEURS | |
Eosinophilie |
Parasitose, gastro-entérite à éosinophiles |
Hypogammaglobulinémie |
Défiicit en Ig |
Protéinurie |
Amylose |
Cholestase |
Pancréatopathies, métas hépatiques d'un néo digestif, RCUH avec cholangite sclérosante |
- CT et/ ou écho abdo
- Tests fonctionnels
- Épreuve de jeune : amélioration après 48h en cas de diarrhée osmotique ou motrice, persistance en cas de diarrhée sécrétoire (> 50% du débit fécal avant le jeune)
- Test au rouge carmin : composante motrice si 1ère selle rouge avant 18h et dernière avant 24h
- Test de Schilling : absorption de la vitB12é marquée → malabsorption iléale?
- Test respiratoire à l'hydrogène : ingestion de glucose → une élévation de l'hydrogène plaide pour une colonisation bactérienne chronique du grêle
- Explorations hormonales : gastrinémie et test à la sécrétine (Zollinger-Ellison), sérotoninémie et dérivés urinaires (tumeurs carcinooïde), calcitonie et VIP en cas de diarrhée sécrétoire inexpliquée. Une scintigraphie à l'octréotide marqué (mise en évidence des R à la somatostatine des tumeurs endocrines) peut parfois être utile.