Lupus érythémateux disséminé (LED)

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Connectivite auto-immune caractérisée par l'association de manifestations systémiques protéiformes et par la présence quasi-constante d'Ac anti-nucléaires. 15-20/100.000 hab, ++ F en âge de procréer (80%), ++ noirs. Etiologie inconnue, résulte probablement de facteurs déclenchants (UVB, autres?) sur un terrain génétique prédisposant.

Clinique

Maladie polymorphe sans syndrome typique. Les signes et symptômes fréquemment recontrés sont :

  • Manifestations dermatologiques (80%)
    • Lésions "spécifiques" (histologie compatible avec un LED), ++ aux zones exposées
      • Érythème en ailes de papillon (60%), nez+ pommettes, maculo-(papuleux), finement squameux, rarement prurigineux, parfois présent sur le décolleté/ les membres
      • Lupus discoïde (15%) : érythème → squames → atrophie séquellaire avec alopécie définitive si cuir chevelu
      • Érythème des faces d'extension articulaires
      • Lésions érosives des muqueuses (++ buccale)
      • Lésions annulaires/ psoriasiformes (++ lupus sub-aigu)
    • Lésions "non spécifiques", ++ par atteinte vasculaire/ inflammatoire/ thrombotique
      • Livedo, urticaire, purpura infiltré, érythème violine des paumes, érythème télangiectasique de la face dorsale des doigts, lésions pulpaires purpuriques  à centre blanchâtre, gangrènes punctiformes
      • Alopécies susceptibles de régresser sous tt
      • Rarement : panniculite, lupus bulleux
  • Manifestations rhumatologiques (quasi-constantes), svt inaugurales et au 1er plan
    • Arhtrites vraies (75%) : oligo/polyarthrites aiguës fébriles bilatérales et symétriques, subaiguës, chroniques
      • ++ métacarpo-phalangiennes, interphalangiennes proximales, carpe, genoux, chevilles
    • Arthro-myalgies (90%)
    • Rarement : téno-synovites, arthrites septiques
  • Manifestations rénales (35-55%), importance pronostique
    • ++ dans les 1ère années d'évolution
    • IRA,  possible IRC. Récidives exceptionnelles après une greffe.
  • Manifestations neurologiques (30-60%) très variables :
    • Crises E généralisées/ focales, hémi/mono/paraplégie, méningite lymphocytaire aseptique, chorée, troubles de la conscience, tableau encéphalopathique, paralysies des nerfs crâniens, neuropathies périphériques, AVC (< endocardite lupique, Sd des Ac anti-phospholipides)
    • Troubles psychiques dans 20% des cas : dépression, accès maniaques, syndrome confusionnel, psychoses
  • Manifestations vasculaires :
    • Phénomène de Raynaud (15-45%), HTA (20-60%), vasculite cutanée/ rénale/ du SNC, syndrome des Ac antiphospholipides avec thromboses veineuses/ artérielles
  • Manifestations cardiaques :
    • Péricardites (30%) ++ latentes découvertes à l'écho, insuffisance cardiaque congestive, troubles du rythme/ de la conduction, endocardite sub-aiguë/ latente, rarement insuffisance coronarienne (++ secondaire à l'athéromatose sur corticoth)
  • Manifestations respiratoires :
    • Toux, dyspnée, hémoptysies,… avec une image d'infiltrats bilatéraux non systématisés récidivants
    • HTAP, rare
  • Manifestations hématologiques :
    • Sd des Ac anti-phospholipides et événements thrombo-emboliques (20% cliniques, Ac présents dans 50%)
    • Leucopénie, anémie, thrombopénie… très fqtes, rarement symptomatiques
  • Manifestations gastro-entérologiques :
    • Pancréatites, colites, péritonites,… ++ sur vasculite lupique
  • Divers
    • Les signes généraux (fièvre, asthénie, perte de poids) sont fréquents lors des poussées viscérales
    • Adp périphériques fqtes, splénomégalie rare, d+ abdo (++ sur tt par AINS), pancréatites et perforations intestinales (sur vasculite mésentérique), hépatomégalie modérée fréquente, rarement hépatite auto-immune de type I, rétinite dysorique, névrite optique, thromboses rétiniennes, Sd de Sjögren fqt, association à la myasthénie,…
    • Fréquentes infections opportunistes (++ dermato, pneumo, uro)
    • Kérato-conjonctivites, uvéites antérieures,…

Evolution généralement par poussées successives entrecoupées de rémissions de durée/ qualité variables. La mortalité sous traitement est de 10% à 20 ans. On différencie les formes cutanéo-articulaires, bénignes, des formes multiviscérales, généralement graves.

! Le risque de poussée grave est important en cas de grossesse si : maladie évolutive en début de grossesse/ néphropathie/ HTA/ interruption de la corticoth. Déconseillée si pas de rémission depuis au moins depuis 6 mois avec une fonction rénale N.

! Les oestro-progestatifs favorisent la survenue de poussées.

Examens complémentaires

  • Biologie :
    • En poussée : élévation VS/ fibrine/ α-2-globuline, élévation modérée de la CRP, anémie inflammatoire (parfois hémolytique auto-immune), leucopénie modérée (++ lymphopénie), thrombopénie périphérique, troubles de l'hémostase (Ac antiprothrombinases = anticoagulant circulant de type lupique avec allongement de l'aPTT), Ac antiphospholipides (présents dans 50% des cas)
    • FAN, Ac anti-ADN  bicaténaire et Ac anti-nucléaires +, anti-SSA, anti  SSB, anti-RNP, FR,…
      • Plus rarement mais plus Sp : anti-Sm
    • Hypocomplémentémie
  • Biopsie des lésions dermatologiques "spécifiques"
    • Lésions dermiques/ épidermiques avec atrophie du corps muqueux, lésions des kératinocytes basaux, infiltrat lymphocytaire périvasculaire, dépôts d'IgA/G/M ou de complément à la jonction dermoépidermique visibles en immunofluorescence
      • Retrouvées à 90% au niveau des lésions, à 60% en "peau saine"
  • RX des articulations touchées : absence de destruction ostéo-articulaire comme dans la PR
  • Biopsie rénale en cas de protéinurie → lésions surtout glomérulaires (+- tubulointerstitielles/ vasculaires) actives (susceptibles de régresser sous tt) ou inactives. Gradation de l'atteinte → généralement présence de l'atteinte la plus grave (GN proliférativve diffuse = stade IV)

Le suivi repose sur : biologie usuelle, recherche de protéinurie, Ac anti ADN natifs et complément (CH50, C3, C4).

Critères diagnostiques (American College of Rheumatology)

Diagnostic si 4 critères / 11, quelque soit l'intervalle de temps séparant les différentes observations et en l'absence d'autre étiologie :

  • Éruption malaire en ailes de papillons
    • Érythème malaire fixe, plan/ en relief, tendant à épargner le sillon nasolabial
  • Éruption de lupus discoïde
    • Placards érythémateux surélevés avec squames kératosiques adhérentes et des bouchons cornés folliculaires, possibles cicatrices atrophiques.
  • Photosensibilité
    • Éruption cutanée inhabituelle à l'exposition solaire
  • Ulcérations buccales/ nasopharyngées habituellement douloureuses
  • Polyarthrite non érosive
    • > 2 articulations périphériques : d+, augmentation de volume/ épanchement articulaire
  • Pleurésie/ péricardite documentée
  • Atteinte rénale
    • Protéinurie > 0,5g/24h / > +++ ou cylindres urinaires
  • Atteinte neurologique
    • Convulsions/ psychose en l'absence de cause iatrogène/ métabolique
  • Atteinte hématologique :
    • Anémie hémolytique avec hyperréticulocytose, GB < 4000/mm³ à 2 reprises, Pq < 100.000/mm³ en l'absence de cause médicamenteuse
  • Désordre immunologique :
    • Cellules LE +, Ac anti-ADN +, Ac anti-Sm +, fausse sérologie syphilitique + depuis > 6 mois confirmée par la négativité du test de Nelson ou du FTA
  • Ac antinucléaire présent à des titres aN en l'absence de médocs inducteurs de lupus

Le cas des "lupus induits"

Secondaires à l'administration de certains médocs

  • Principalement : INH, D-pénicillamine, chlorpromazine, minocycline, certains antiE (phénytoïne, ethosuximide, carbamazépine, trimethadione, primidone) et β-bloquants (acebutolol, atenolol, labetalol, oxprenolol, pindolol, propanolol, timolol), hydralazine, quinidine, méthyldopa
  • Autres : acide aminosalicylique, allopurinol, acide nalidixique, aminogluthetimide, amoproxan, anthiomaline, canavanine, captopril, carbutamide, chlroprotixene, chlorthalidone, clonidine, dihydralazine, l-dopa, dowazosin, greseofulvine, guanoxan, hydrazine, inferferon α et γ, lithium, lovastatine, methimazole, methylthiouracile, nitrofurantoïne, nomifensine, oxyphenisathine, penicilline, phenylbutazone, prazosin, propafenone, propylthiouracile, pyrithioxine, reserpine, sels d'or, streptomycine, simvastatine, sulfasalazine, sulfonamides, tetracyclines, thionamide, tolazamides
  • + nbx cosmétiques, PUVAth, silicones

Survienent plus tard, prépondérance féminine moins marquée, tableau dominé par des signes généraux/ rhumato/ pleuropulmonaires/ péricardiques. Généralement bénins du fait de la rareté des atteintes rénales/ neuros. Profil biologique particulier : FAN très élevés, absence habituelle d'Ac anti-ADN natif et d'hypocomplémentémie, Ac anti-histones fqts. L'arrêt du médoc inducteur suffit généralement à obtenir une régression en qq j/sem, une courte corticoth est parfois utile.

Traitements

  • Mesures générales : éviction des œstroprogestatifs et des médocs inducteurs de lupus (remettre une liste au patient !), planification des grossesses, éviction du soleil et utilisation d'un écran total/ lunettes de soleil/ chapeau à bords larges, éducation à la reconnaissance des signes avant-coureurs de poussées
  • Traitements spécifiques :
    • Lupus quiescent : simple surveillance clinico-biologique
    • Formes mineures cutanéo-articulaires :
      • AINS : indométacine ou AAS 2-4g/j
      • Antimalariques de synthèse : hydroxychloroquine 400mg/j avec surveillance ophtalmo annuelle (posssible toxicité rétinienne), CI = grossesse
      • Ssi atteinte articulaire résistante : prednisone < 10 mg/j
      • Ssi atteinte cutanée résistante : envisager des associations (thalidomide,…) aux antimalariques
    • Formes viscérales :
      • Prednisone (1-1,5 mg/kg/j dans les formes graves [GN prolifératives diffuses, anémies hémolytiques], 0,5 mg/kg/j dans les sérites) en 2-3x/j au début puis en 1 prise
        • Prévention des ES de la corticoth : réduire les apports en sel et glucides, supplémentation potassique, pansements gastriques, Cacit D3 +- bisphosphonates
        • Dose d'attaque durant 1,5-3 mois, ensuite régression de 10% tous les 5-15j
        • En cas d'arrêt : explorer préalablement l'axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien
        • En cas de poussées sévères rénales/ neuros : bolus de 1mg de solumédrol en 1h pendant 3j puis relais oral
      • Immunosuppresseurs à discuter uniquement dans les formes graves/ corticodépendantes (risque carcinogénique) : cyclophosphamide, azathioprine,…
  • Divers :
    • Si thrombopénies sévères résistantes à la corticoth : envisager perfs d'Ig +- splénectomie
    • Traitement d'un Sd antiphospholipides si associé (! ne traiter que si manifestations cliniques ! sinon, abstention ou asaflow 80-160mg/j)