Bioéthique

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La bioéthique une activité de réflexion destinée à trouver des solutions concrètes, règles de conduites, à des problèmes conflictuels nés des développements des sciences de la vie.

De façon plus générale, l'éthique est la doctrine du bonheur des hommes et des moyens d'y arriver au travers d'un ensemble de règles de conduites. Elle fait partie de la morale. La morale peut quant à elle se définir comme un ensemble de règles d'action et des valeurs qui fonctionnent comme normes dans une société, une théorie des fins des actions de l'homme.

Principes fondamentaux de l'éthique des soins de santé

  • Bienfaisance : aider, soulager, guérir
  • Refus de nuire : balance entre bénéfices de santé et risques pour les patients
  • Justice : tous les malades ont droit aux mêmes soins, de même qualité
  • Respect de l'homme et de son autonomie : droit de décider de ses actes et d'en assurer la responsabilité → devoir d'informer, de vérifier la compréhension de l'information, de conseiller, de proposer

Le consentement

Fondements du consentement: droit à l'intégrité, à la libre disposition de son corps, à l'autonomie, obligation générale de prudence et de prévoyance, exécution de bonne foi des conventions

Consentement "libre" et "éclairé": s'assurer que le patient est en état d'exprimer sa décision, devoir d'informer pour que cette décision soit prise en connaissance de cause.

Ce n'est pas un transfert de responsabilité du médecin vers le patient car la relation patient-médecin (contrat de confiance) exige toujours la décision des soignants dans leurs compétences, donc leur responsabilité, et de ce fait leur autonomie.

Ce consentement est l'un des fondements de l'immunité du médecin (cf supra).

Ce consentement ne doit pas être mis par écrit, sauf pour la stérilisation, les IVG, les prélèvement d'organes sur un donneur vivant, les essais cliniques de médicaments… mais on tend à demander un accord écrit pour de plus en plus d'actes pour se protéger d'éventuelles poursuites judiciaires. Un avis de 1999 a été émis par le conseil national de l'ordre : il n'est pas favorable, pour éviter une atmosphère de méfiance entre patients et médecins, à l'élaboration d'un formulaire de consentement éclairé qui doit rester une situation d'exception lorsqu'un litige est réellement à craindre.

Exceptions au consentement libre et éclairé:

  • droit "à ne pas savoir"
  • situations urgentes
  • exceptions thérapeutiques (si le médecin pense que l’information nuira au patient), néécessite l’avis d’un confrère (qui doit laisser une note)
  • vaccinations légalement obligatoires

Le défaut d'information constitue une faute légale. Bien qu'il existe un débat sur l'étendue de cette information (impossibilité pratique d'exposer tous les aspects d'une maladie ou tous les risques et effets secondaires d'un traitement, l'information s'oppose parfois au principe de bienfaisance, le "droit à ne pas savoir" est un concept assez flou dans certaines situations,...).

Pratique de la bioéthique et prise de décision

Reconnaître les situations nécessitant une réflexion éthique : "est-ce bien?", choix thérapeutiques difficiles, conflits de valeurs,… :

  • signes psychologiques des soignants : sensation de stress ou d'incertitude, anxiété, irritabilité, indécision.
  • signes sociaux de l'équipe soignante : absence de communication ou évitement quant à la situation du patient
  • tensions et discorde dans l'équipe, réduction de l'efficacité et de la qualité des soins, absentéisme, demandes de mutation

Elaborer une procédure décisionnelle:

  • identifier la ou les personnes en charge de la décision
  • réunir les données, diagnostics, pronostic, risques
  • évaluer la psychologie du malade, son échelle de valeurs et de qualité de vie
  • réflexion multi-disciplinaire en permettant à tous de s'exprimer (renforce le poids des décisions, identifie des informations et enjeux éthiques non perçus, minimise le risque d'erreur, permet de se former,...)
  • expliquer et justifier la décision prise au reste de l'équipe, au malade et à ses proches

Structures de bioéthique

Le comité consultatif de bioéthique

Installé depuis 1995 avec 2 missions:

  • donner un avis sur des problèmes soulevés par la recherche et ses applications en biologie, médecine et santé, en ce qui concerne l'homme, des groupes ou la société
  • informer le public et les instances politiques

Il compte 35 membres de la société civile : 16 universitaires (8 des "sciences exactes" et 8 des "sciences humaines"), 10 membres de corps constitués (6 proposés par l'ordre des médecins, 2 avocats choisis par le Conseil national de l'ordre, 2 magistrats), 9 membres choisis par les gouvernements, fédéral et communautaires. Equilibre linguistique et parité de genre.

Il peut être saisi par:

  • les présidents des différentes assemblées législatives (nationale ou communautaires), à leur initiative ou à la demande de 10 sénateurs/ députés/ conseillers communautaires)
  • un membre d'un exécutif (national ou communautaire)
  • un organisme de recherche, un établissement de soins ou d'enseignement supérieur
  • un comité d'éthique local rattaché à un établissement de soins ou à une université

Il peut en outre se saisir lui-même de toute question

Il rend des avis consultatifs dans les 6 mois d'une saisine, tient un centre de documentation, organise une conférence bi-annuelle sur les problèmes bio-éthiques.

Les comités d'éthique locaux hospitaliers (loi de 1987)

Doivent être présents dans chaque hôpital belge, 2 missions:

  • accompagnement et conseil concernant les aspects éthiques de la pratique des soins hospitaliers
  • avis sur tout protocole d'expérimentation sur l'homme

Ils comprennent 8 à 15 membres, en majorité des médecins de l'hopital, minimum 1 MG hors hopital, minimum 1 infirmier, minimum 1 juriste. Il donne des avis consultatifs. Tout membre du personnel et tout médecin peut l'interroger.

Comités d'éthique locaux

Depuis 1985 l'ordre des médecins enregistre et agrée des comités locaux, structures informelles dans le cadre d'universités ou de groupes divers.

Structures informelles

Groupes divers qui en ont pris l'initiative.

L'expérimentation humaine : bases juridiques

En Belgique il n'existe pas de véritable base légale "stricto sensu" codifiant l'expérimentation. Cependant, la loi belge exige des procédures d'expérimentation avant la mise sur le marché de médicaments (1964). De plus, un article de la loi sur les hôpitaux définit des compétences en matière d'expérimentation humaine aux comités d'éthique locaux. Une directive européenne décrit des principes conduisant à l'enregistrement des médicaments. En outre, de nombreuses références internationales dont la Belgique est signataire codifient l'expérimentation (ex : déclaration d'Helsinki dont la dernière révision date de 2000, convention européenne sur les Droits de l'Homme et la Biomédecine,…). Rappel historique : le code de Nuremberg établit en 1947 se veut une réponse aux expérimentations nazies et définit dix critères devant être respectés dans le cadre d'expérimentations sur l'homme.

Par ailleurs, le code de déontologie médicale du CNO, en conformité avec la législation nationale et internationale, impose différents principes et l'avis d'un comité d'éthique indépendant.

Le comité consultatif de bioéthique a rendu un avis en 2001 relatif aux expérimentations sur l'homme :

  • l'expérimentation est un devoir déontologique
  • elle est vecteur de dynamisme et d'évolution des pratiques médicales
  • elle a un effet sur la qualité des soins
  • elle permet aux patients l'accès rapide aux nouvelles possibilités
  • la déclaration de l'expérimentation à l'hôpital est indispensable et est de la responsabilité de l'expérimentatateur (médico-légal, assurance professionnelle, intervention dans les frais, transparence, pas d'interférence avec l'organisation de la continuité des soins).
  • l'avis du Comité Local d'Ethique :
    • est crucial pour la protection des sujets et la qualité de la recherche
    • obligation de demander un avis = garde-fou
    • il doit comprendre :
      • Légitimité éthique du but
        • Intérêt scientifique (justifier l'apport à la connaissance, "pas d'intérêt scientifique, pas de légitimité éthique!")
        • Élaboration d'un protocole adéquat (susceptible de répondre aux questions posées, en avoir les moyens et les compétences)
        • Existence de pré-requis (appui sur des connaissance antérieure légitimant le projet, l'ensemble des données dispos a-t-il été récolté, suffisants pour l'expérience?…)
      • Proportionnalité des moyens (risque versus bénéfice escompté, évaluation très difficile, 0,04% d'ES très graves et 0,55% modérés en UK, bénéfice à visée "cognitive" ou "thérapeutique"), prééminence de l'intérêt du patient/ volontaire sain sur l'intérêt de la collectivité… mais toute expérimentation comporte un risque…
        • Le risque potentiel peut être physique, psychologique, socio-économique
        • Prise en compte de la gravité, de la probabilité d'apparition, de la réversibilité, de la possibilité de le contrecarrer.
      • Qualification des expérimentateurs et environnement de l'expérience (compétence, matériel, disponibilité, compétition entre différents protocoles)
      • Consentement libre et éclairé, personnel et préalable
        • Information préalable, indispensable au consentement éclairé (données sur la responsabilité et l'assurance, les limites sur la confidentialité, remarques du conseil d'éthique, méthode, durée, bénéfices attendus, risques, contraintes,…)
        • Recueil du consentement, préalable, libre de toute pression morale ou financière (?) → pas de rémunération mais un dédommagement pour les frais et le temps de travail perdu
        • Il doit pouvoir être retiré à tout moment sans justification
        • Il se pose divers problèmes : soumission à l'autorité, expérimenter sur volontaires sains/ femmes enceintes/ patients psys ou mineurs/ prisonniers/…, situations spécifiques.

La problématique de la fin de vie

Principales décisions médicales concernant la fin de vie : 38% consistent en une décision de non-traitement, soulagement des douleurs et symptômes, euthanasie et équivalents.

Les principaux motifs évoqués par les patients demandant l'euthanasie sont :

  • perte de dignité 57%
  • douleur 46% (motif invoqué isolément : 10%)
  • "agonie n'en valant pas la peine" 46%
  • dépendance des autres" 33%
  • "fatigué de vivre" 23%

En Belgique, 54% des médecins (62% des généralistes et 44% des spécialistes) ont pratiqué l'euthanasie. 12% des médecins déclarent qu'ils refuseraient d'en pratiquer une, dont 8% sont prêts à référer le patient à un collègue. Les demandes d'euthanasie sont en augmentation, tout comme le nombre de médecins se déclarant prêts à en pratiquer. 

Auteur(s)

Dr Shanan Khairi, MD