Atteintes neurologiques d'infections systémiques : maladie de Whipple

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La maladie de Whipple est secondaire à une infection à Tropheryma Whippelii (bacille gram positif, actinomycète, retrouvé dans des eaux d’égouts), chronique et multisystémique, dont le mode de transmission reste inconnu (ingestion d’eau contaminée ? Transmission iatrogène par gastroscope ?). Elle est exceptionnelle. ≈ 85% des cas rapportés sont des hommes, ++ cinquantenaires (mais les cas rapportés s'étalent de 4 à 77 ans), quasi-exclusivement caucasiens. Aucun facteur de risque n'a été identifié. Physiopathologie liée à des facteurs immunologiques ?

Cet article traite spécifiquement des atteintes neurologiques (neuro-Whipple) de cette maladie, les généralités et autres atteintes étant traitées dans un chapitre spécifique.

  Voir l'article détaillé: Maladie de Whipple

La diffusion de la bactérie au système nerveux central est très fréquemment mise en évidence, même en l'absence de symptomatologie neurologique. La sémiologie neurologique est polymorphe et peu ou non spécifique → diagnostic souvent méconnu ou porté tardivement… alors que l'évolution est liée à la précocité de l'antibiothérapie… et est toujours fatale en l'absence de traitement.

Clinique neurologique

Des signes ou symptômes neurologiques surviendraient chez 20 à 40% des patients atteints d'une maladie de Whipple en cours d'évolution, Le plus souvent tardivement dans un contexte multisystémique (mais des atteintes neurologiques isolées ou inaugurales ont été décrites). La sémiologie est polymorphe mais l'affection doit certainement être évoquée devant :

  • La triade démence + ophtalmoplégie + myoclonies faciales
  • L'association de différents éléments, sans explication évidente, parmi : démence, troubles cognitivo-comportementaux, troubles oculo-moteurs (++ des mouvements verticaux tels qu'on en rencontre dans la paralysie supra-nucléaire progressive), mouvements anormaux (de tous types mais ++ myoclonies… celles étant considérées comme les plus spécifiques étant les myoclonies oculomasticatoires rythmiques), dysfonctionnement hypothalamique (polyurie, polydypsie, polyphagie, troubles de la régulation thermique, syndrome de sécrétion inappropriée en hormone anti-diurétique,…), ataxie cérébelleuse
  • Mise en évidence d'une atteinte neurologique quelconque avec un syndrome inflammatoire inexpliqué, une fièvre persistante d'origine inexpliquée, des atteintes viscérales (++ digestives) inexpliquées ou des arthralgies-myalgies au long cours inexpliquées.

Examens complémentaires

  • Biologie : anomalies généralement aspécifiques
    • VS habituellement élevée (++ ≈ 50mm). PCR sanguine parfois positives
    • Signes de malabsorption (80%) : hypoalbuminémie, anémie hypochrome normocytaire, (hypocalcémie, carence en vitamine B12,…)
  • Stéatorrhée ou test au D-xylose perturbé dans 80% des cas
  • Liquide céphalo-racidien (ponction lombaire) : tests usuels normaux dans 50% des cas. Sinon on peut observer une élévation modérée de la protéinorachie, une élévation des IgG ou des bandes oligoclonales
    • Les cultures bactériennes ne sont que très rarement positives
    • PCR → indispensable : sensibilité de (50)-80% mais très spécifique (et parfois positive même lorsque la PCR digestive est négative)
  • CT-scanner cérébral : possiblement normal ou montrant éventuellement des hypodensités de petite taille, une atrophie corticale ou, exceptionnellement, des lésions expansives ou une hydrocéphalie
  • Critères diagnostiques et biopsie duodénale avec coloration PAS et PCR : cf le chapitre consacré aux généralités de la maladie de Whipple

Prise en charge thérapeutique - Traitements

On observe > 90% de réponse à l'antibiothérapie mais 5 à 30% de rechutes (parfois après plusieurs années). Les atteintes neurologiques sont de plus mauvais pronostic et de récidives plus fréquentes que les autres atteintes viscérales. La positivité du liquide céphalo-rachidien, même en l'absence de symptomatologie neurologique, doit faire considérer de principe une infection précoce du système nerveux central et la faire traiter comme telle.

Traitement empirique des infections du système nerveux central : ceftriaxone 2 g/ jour IV (ou pen G 4 MU 6 x/ jour IV) durant 4 semaines puis sulfaméthoxazole 800 mg 2 x/ jour + triméthoprime 160 mg 2 x/ jour (= bactrim forte 1co 2 x/ jour) durant minimum 1 an. Efficacité à estimer par : réponse clinique, répétition des analyses histologiques et PCR tous les 6 mois (généralement négativisation de la PCR dans le LCR dans les 2 à 6 mois).

En cas de récidive : même traitement mais doses de ceftriaxone de 2 x 2 g/ jour IV. En cas de nouvelle récidive, envisager des cures répétées de ceftriaxone IV.

Risque de SIRS en réaction au traitement → envisager anti-inflammatoires et/ ou corticothérapie à visée symptomatique.

Auteur(s)

Dr Shanan Khairi, MD