Droit concernant directement la pratique médicale

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De nombreux éléments de droit, impossibles de recenser exhaustivement, concernent l'exercice médical en Belgique. Cet article aborde ceux dont la connaissance est indispensable à tout médecin. Les lois encadrant la déontologie médicale sont quant à elles abordées dans un autre article.

La législation belge est consultable en ligne.

Article 422 bis du code pénal : non assistance à personne en danger

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Le médecin sera généralement plus sévèrement sanctionné qu’un autre citoyen dans ce cadre. Comme pour tout citoyen, il n'y a cependant pas infraction si un médecin s'abstient d'une intervention présentant un danger pour lui ou pour une personne tierce (ex : ne pas faire le bouche-à-bouche durant une RCP [tuberculose], ne pas secourir une personne en l'absence de masque adéquat disponible alors que la présence d'un gaz toxique est suspectée,…)

Article 458 du code pénal : secret professionnel

Une sanction pénale est prévue en cas de rupture du secret professionnel (même à la demande du patient).

Il existe cependant certaines exceptions :

  • Exceptions légales (définies par la loi) : déclaration de naissance et de décès, témoignage devant un juge (jamais devant des policiers), déclaration de maladies épidémiques, nécessité pour le médecin de se défendre en justice, assurances terrestres, mineurs et personnes incapables,...
  • L'arrêt de 1987 de la Cour de Cassation bien que très imprécis évoque toute situation risquant de porter un grave préjudice au patient ou à un tiers

Dans tous les cas de figure, il appartient au seul médecin de juger de l'opportunité de lever le secret médical. Quitte à devoir en répondre devant la justice ou le Conseil de l'Ordre.

Arrêt de la cour de cassation de 1987

Se fondant essentiellement sur la notion d'assistance à personnes en danger, cet arrêt précise qu’en cas de conflit entre le secret professionnel et les valeurs morales, dans une situation de nécessité, la violation de ce secret est un "moindre mal face au mal grave et imminent qui risque de survenir si les faits ne sont pas dévoilés". Couvre notamment le cas de la maltraitance sur personne incapable.

A noter que cet arrêt a été rendu par la Cour de Cassation suite au recours d'un médecin contre une sanction qui lui avait été infligée par l'Ordre des Médecins... illustrant ainsi aussi bien les difficultés d'interprétation de la déontologie médicale que les contradictions entre les impératifs légaux et ordinaux.

Articles 348-353 du code pénal : dépénalisation partielle de l'interruption volontaire de grossesse (IVG)

Contrairement à une idée reçue, l’IVG est toujours interdite de principe en Belgique, mais la loi de 1990 prévoit qu’il n’y a pas infraction lorsqu'elle est pratiquée dans certaines conditions ("dépénalisation partielle") :

  • grossesse inférieure ou égale à 12 SAG (14 DDR)
    • centre de soins adapté, information adaptée, constater un état de détresse et de détermination, délai de 6 jours entre la première demande et l’IVG, consentement écrit de la femme le jour de l’IVG
  • au-delà de 12 SAG en cas de péril grave pour la santé de la mère ou s’il est certain que l’enfant à naître sera atteint d’une affection grave et incurable (nécessite l’avis d’un deuxième médecin)

Toute IVG doit être déclarée à la commission d’évaluation. Aucun membre du personnel soignant n’est tenu de participer à une IVG.

Arrêté Royal de 1999 relatif au dossier médical

Un dossier médical doit être tenu pour tout patient. Doit être conservé pendant au moins 30 ans.  Il doit comprendre :

  • l’identité du patient, ses antécédents familiaux et personnels, l’histoire de la maladie
  • les résultats des examens cliniques et complémentaires
  • les avis des médecins consultés
  • les diagnostics provisoires et définitifs
  • les traitements mis en œuvre, les protocoles opératoires
  • l’évolution de la maladie
  • éventuellement le protocole de l’autopsie
  • le rapport de sortie

Le patient ou son représentant légal a le droit de prendre connaissance, par l’intermédiaire d’un médecin choisi par lui, des données objectives du dossier médical

Loi de 2002 relative aux droits du patient

  • prestations de qualité, sans distinction
  • droit au libre choix du praticien
  • droit à l’information (base de l’autonomie pour permettre au patient de participer activement à son traitement). Le patient peut demander par écrit que les infos soient transmises à une personne de confiance. Droit de non information si le patient en fait la demande (sauf si la non communication porte préjudice au patient ou a un tiers, après avis d’un confrère et de l’éventuelle personne de confiance).
  • Le praticien peut cependant exceptionnellement ne pas divilguer une information si elles risquent de porter un préjudice grave à la santé du patient (après avis d’un confrère). L’éventuelle personne de confiance en est avertie. Cela est consigné dans le dossier médical.
  • Droit à consentir librement à toute intervention. Droit de refuser ce consentement ou de le retiirer.
  • Lorsqu’en cas d’urgence il y a incertitude sur la volonté du patient ou son représentant, toute intervention nécessaire est pratiquée.
  • S’il s’agit d’un patient mineur (ou autre dépendant) et que ses parents/ tuteurs refusent leur consentement à un acte jugé nécessaire, le médecin peut prévenir le procureur du Roi qui peut temporairement retire l’autorité parentale/…
  • Droit à un dossier médical. Droit de consultation de ce dossier par le patient/ une personne de confiance, endéans les 15 j de sa demande, excepté les annotations personneles et données concernant des tiers. Droit d’obtenir, au prix coûtant, une copie de son dossier. Cette copie doit cependant lui être refusée si le médecin suspecte que des tiers (passibles de poursuites) ont fait pression sur le patient pour obtenir le dossier. Après la mort du patient, ses collatéraux pourront cosulter le DM, sauf opposition du patient de son vivant. S’il l’estime opportun, le médecin peut refuser l’accès au DM, mais a l’obligation alors d’en laisser l’accès à un autre médecin mandaté par le patient.
  • Dans le cas d’un mineur, les droits sont exercés par les parents, mais il revient au médecin d’apprécier le degré de maturité de l’enfant et de sa capacité à participer activement aux décisions le concernant.
  • Dans le cas d’un patient majeur devenu incapable d’exercer ses droits, ceux-ci sont exercés par la personne qu’il aura désignée comme devant se substituer à lui (mandat écrit et spécifique daté et signé, révocable par le patient ou le mandataire). En l’absence de mandataire, celui qui veillera à l’intérêt du patient sera l’époux/ le partenaire cohabitant légal/ de fait, puis par un enfant majeur, puis par un autre parent majeur. S’il n’y en a pas ou qu’ils refusent d’endosser ce rôle ou qu’ils n’arrivent pas à se mettre d’accord, le médecin veillera lui –même aux intérêts du patient. Néanmoins, le patient sera associé à l’exercice de ses droits autant que possible. En outre, si une telle personne existe, mais que le médecin estime que sa décision nuit gravement à l’intérêt du patient, le médecin peut passer outre la décision… sauf si la personne peut prouver que sa décision correspond à la volonté expresse du patient.
  • Une Commission fédérale pour les droits des patients est créée. Ses missions : collecter et traiter les données relatives aux droits des patients, formuler des avis a l’attention du ministre de la SP concernant les droits et devoirs des patients et praticiens, évaluer l’application de la loi sur les droits des patients, évaluer le fonctionnement des fonctions de médiation, traiter les plaintes relatives à la médiation. Composition : patients, praticiens, hopitaux, organismes assureurs.
  • Un service de médiation est créé auprès de la commission, compétent pour renvoyer une plainte à la fonction de médiation compétente ou la traiter lui-même.
  • L’hôpital est responsable des manquements de ses praticiens. L’hôpital doit avoir un service de médiation.
  • Concernant les contrats d’assurances terrestres, le médecin peut établir à la demande du patient un certificat se bornant à décrire l’état actuel du patient en fonction de ses antécédents et ne peut émettre des considérations personnelles ou sur l’état futur du patient (sur base d’analyses génétiques par exemple). Ce certificat ne peut être transmis qu’au médecin conseiil de l’assureur. En cas de décès, un certificat se bornant à établir la cause du décès sera transmis au médecin conseil de l’assureur, pour autant que l’assureur se prévale de l’accord préalable de l’assuré.

NB : il est impossible d’informer complètement un patient… on doit cependant s’assurer qu’il reçoive au moins le minimum d’informations nécessaires à une décision éclairée.

En cas d’infraction à cette loi, le patient a le droit de porter plainte devant la commission de médiation.

Loi de 2002 relative à l'euthanasie, modifiée en 2014

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Euthanasie = acte visant à mettre fin à la vie d’une personne à la demande de celle-ci.

L’euthanasie reste une infraction, sauf si elle est pratiquée par un médecin dans certaines conditions :

  • Le patient est majeur ou mineur émancipé ou mineur "capable de discernement", conscient et capable au moment de sa demande. Seul le patient peut faire une telle demande.
  • La demande doit être claire, répétée et sans pression
  • Situation médicale sans issue, affection grave et incurable + souffrance physique ou psychique constante et insupportable ne pouvant être apaisée
  • Le patient doit acter sa demande par écrit. S’il en est incapable, il peut la faire acter par un majeur n’ayant aucun intérêt à son décès
  • Le médecin doit préalablement :
    • Informer le patient de son état et de son espérance de vie
    • S’assurer de la persistance de la souffrance et de la volonté du patient
    • Consulter un autre médecin, indépendant, quant à l’affection
    • Si le patient est un mineur non émancipé, il faut également consulter un pédopsychiatre ou un psychologue + informer les représentants légaux du mineur et s'assurer qu'ils soutiennent sa demande par un accord écrit
    • S’entretenir avec les proches du patient si telle est sa volonté
    • Laisser au moins un mois entre la demande écrite du patient et l’euthanasie
  • Tout, y compris les demandes réitérées du patient, doit être consigné dans le dossier médical, qui seul fait foi pour dire si tout s’est déroulé correctement.
  • Le médecin doit remettre dans les 4 jours ouvrables suivant l’euthanasie le document d’enregistrement à la commission fédérale de contrôle et d’évaluation

Cas de la déclaration anticipée : consignation par écrit de sa volonté qu’un médecin pratique une euthanasie s’il est atteint d’une maladie grave et incurable, inconscient et que son état est jugé irréversible dans l’état des connaissances. Doit être actée par deux témoins majeurs. Valable 5 ans.

Notons que la loi prête à interprétations quant aux personnes démentes…

La commission fédérale de contrôle et d’évaluation est composée de 16 membres : 8 médecins dont au moins 4 profs d’unif, de 4 avocats/ professeurs en droit, de 4 membres de milieux en charge de la problématique des maladies incurables. Elle élabore le document d’enregistrement. Elle vérifie les documents d’enregistrement. En, cas de doute, elle peut décider de lever l’anonymat (consulte le premier volet scellé reprenant l’identification), demander au MT de lui envoyer les éléments du DM relatifs à l’euthanasie et convoquer le  médecin ayant pratiqué l’euthanasie. Par décision à la majorité des 2/3, elle peut décider d’envoyer le dossier au procureur du Roi. 

Aucun médecin ni autre personne n’est tenu de participer à une euthanasie. Le médecin devra informer le patient en temps utile le patient, en motivant sa décision : raisons personnelles ou raisons médicales.

Une personne décédée suite à une euthanasiee est réputée décédée de mort naturelle pour tous les contrats auxquels elle était partie.

Auteur(s)

Shanan Khairi, MD