Myopathies éthyliques (alcooliques)

Aller à : navigation, rechercher

Les myopathies éthyliques (alcooliques) sont fréquentes. Elles se rencontrent plus fréquemment chez les hommes du fait d'une incidence de l'éthylisme masculin plus importante mais les femmes sont à risque de les développer pour des doses d'alcool moitié moindre que les hommes du fait d'un métabolisme féminin de l'alcool moins performant.

Physiopathologie

Les mécanismes de ces myopathies ne sont pas encore connus avec certitude.

De manière générale, on évoque une toxicité directe de l'alcool sur la fonction mitochondriale, des carences induites par la consommation d'alcool (en particulier du phosphore et potassium, de la vitamine B1,...) et des rhabdomyolyses (sur crises convulsives éthyliques ou compressions de membres lors des épisodes stuporeux).

On retrouve fréquemment dans les épisodes de myopathies aiguës des facteurs déclenchants tels que des crises convulsives, une hypokaliémie, une privation de nourriture, un delirium tremens, une compression de membre prolongée, une infection intercurrente,...

Sur le plan histologique, les myopathies chroniques se caractérisent par une atrophie prépondérante sur les fibres musculaires de type IIb (fibres à contraction rapide). Dans les myopathies aiguës, on observe des plages de nécrose (parfois avec une composante inflammatoire) et de régénération avec une atrophie prépondérante sur les fibres de type I (fibres à contraction lente).

Clinique

On distingue plusieurs formes cliniques se mêlant fréquemment :

  • Cardiomyopathies :
    • Chroniques : se manifestent classiquement par des cardiomyopathies dilatées d'évolution lente avec insuffisance cardiaque chronique.
    • Aiguës : soit sur décompensation aiguë d'une insuffisance cardiaque chronique, soit survenant d'emblée sur un mode aigu. Dans ce cas, elles se manifestent fréquemment par une insuffisance cardiaque initialement à haut débit avant d'évoluer vers un bas débit.
  • Myopathies squelettiques :
    • Subaiguës ou chroniques
      • Sont fréquemment asymptomatiques ou pauci-symptomatique. Peut se manifester par une faiblesse des ceintures avec des muscles non douloureux.
      • Concerne 50% à 60% des alcooliques.
    • Aiguës
      • Faiblesse et oedèmes très douloureux des muscles
      • Coexistent parfois avec une atteinte des muscles de la déglutition (dysphagie, augmente nettement la mortalité)
      • Risque d'insuffisance rénale (rôle de la myoglobinurie ?) et de troubles ioniques sévères
      • Généralement réversible en quelques jours à quelques mois en cas d'abstinence

La distinction de ces formes est toute théorique. La coexistence de cardiomyopathies et de myopathies squelettiques est fréquente. Les épisodes aigus surviennent généralement sur un terrain de myopathie chronique pré-existant.

En outre, elles co-existent généralement avec d'autres complications de l'éthylisme.

Examens complémentaires

Le diagnostic étant généralement évident sur base clinique, les examens complémentaires présentent peu d'intérêt sauf pour exclure des diagnostics différentiels ou dépister des complications. Les examens biologiques peuvent montrer une élévation des CK, CK-MB et une myoglobinurie dans les myopathies aiguës. Dans les formes chroniques, l'élévation des CK est inconstante et il n'y a pas de myoglobinurie.

L'échographie cardiaque est cependant indispensable pour grader l'éventuelle atteinte cardiaque.

Prise en charge

Il n'y a pas de traitement spécifique.

  • Prise en charge symptomatique et des complications (attention particulière aux troubles ioniques et insuffisance rénale en cas de myopathies aiguës, prise en charge d'une insuffisance cardiaque, de troubles de la déglutition,...)
  • Supplémentation vitaminique systématique (hautes doses IV en cas de myopathies aiguës)
  • Abstinence éthylique

En cas de prise en charge précoce, la récupération totale ou partielle est la règle dans les formes aiguës pour les survivants.

Concernant les formes chroniques, l'abstinence est rarement obtenue. Mais si elle l'est, la symptomatologie s'améliore fréquemment bien que de façon moins spectaculaire que dans les formes aiguës.

Auteur(s)

Dr Shanan Khairi, MD

Bibliographie

Goetz CG, Textbook of Clinical Neurology, 3th ed., Saunders, 2007